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En aparté avec… Jean-Baptiste Lemoyne
par Mahdi A., mai 2021 (Human Village 42).
 

Le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargé du Tourisme, des Français de l’étranger et de la Francophonie, Jean-Baptiste Lemoyne, a accordé un entretien à Human Village, samedi 15 mai. Il est revenu sur la relation franco-djiboutienne, qu’il qualifie de « stratégique ». Il répond aux questions concernant la relation entre les deux pays, notamment les investissements attendus, la coopération multidimensionnelle, le rôle de Djibouti dans la région Indo-pacifique, l’entraide dans la lutte contre le Covid, la Grande Muraille verte (GMV)…

Pourriez-vous nous donner une évaluation de la situation des relations entre la France et Djibouti à la suite de la visite officielle du président Ismaïl Omar Guelleh en France ? Il est question d’un projet aéroportuaire et d’investissements dans l’hôtellerie. Que pouvez-vous nous en dire ?

Ce sont des relations au beau fixe. En ce qui me concerne c’est la deuxième fois que je viens en quelques mois. Le président de la République, Emmanuel Macron, a tenu à ce que la France soit représentée au niveau ministériel parce que cela reflète la force de notre relation, qui est particulière. Ce que je veux dire, c’est qu’il y a une histoire, et un avenir que l’on est en train de préparer ensemble pour le bien de nos peuples respectifs. À, ce propos, les deux présidents ont eu des échanges très fructueux le 12 février dernier. Je peux en attester puisque j’ai suivi cela de près. On est vraiment dans un renforcement des relations à tous les niveaux : sur les dimensions éducative, énergie durable, mais aussi, naturellement, stratégique. Nous sommes dans une dynamique favorable et nous sommes décidés, les uns les autres, à mettre tout cela en œuvre.
Le président Ismaïl Omar Guelleh a fait part de la voie qu’il trace pour Djibouti, et la France, partenaire historique du pays, entend bien évidemment y participer et l’accompagner. Djibouti s’est positionnée comme un hub très important sur l’Afrique de l’Est, il y a ce projet d’aéroport et la France a d’ores et déjà engagé des financements pour réaliser les études préparatoires. C’est un projet structurant pour le pays, ainsi que pour la relation entre les deux pays. On est vraiment en action, et d’ailleurs le top départ des études sera donné le 3 juin en présence de l’ambassadeur de France Arnaud Guillois et des entreprises Aéroport de Paris Ingénierie et Egis. Expertise France participe aussi à ces projets qui sont importants pour le futur du pays.

Quelle sera la durée de ces études ?
De trois à cinq mois.

Vous êtes également au sein de votre gouvernement le représentant des Français de l’étranger. Pourriez-vous nous dire le poids économique des entreprises tricolores sur notre territoire et le nombre de ressortissants installés à Djibouti ? Ont-ils pu bénéficier au même titre que les Djiboutiens des vaccins anti-Covid-19 ou ont-ils reçu des vaccins de la France ?
Il y a entre 4000 et 5000 Français établis ici, expatriés et binationaux. C’est une communauté qui est vivante, forte, dans un écosystème économique dynamique. Elle est regroupée au sein d’un club d’une trentaine d’entreprises françaises. Et s’agissant des Français établis hors de France, je tiens à remercier le gouvernement de Djibouti. Ils ont pu, pour ceux qui le souhaitaient, s’inscrire dans la stratégie vaccinale de Djibouti. Certains ont déjà été vaccinés, et c’est vrai que c’est par la coopération que l’on vaincra ce fichu virus. Et puis par ailleurs, j’ai mis en place une stratégie vaccinale pour ces communautés françaises. C’est ainsi que je suis venu avec un millier de doses de vaccin à destination de nos compatriotes, et également du matériel pour Djibouti parce que, une fois de plus il faut le dire, c’est par la solidarité que l’on y parviendra. J’ai apporté 20 000 tests antigéniques qui contribueront à renforcer la stratégie vaccinale de votre pays. La stratégie vaccinale ici montre que la coopération est à l’œuvre et qu’elle fonctionne dans les deux sens.

La région Indo-Pacifique est devenue une priorité : quels y sont les enjeux pour la France ? Dans ce grand espace stratégique, quelle est la place de la présence militaire française à Djibouti ?

La région est en effet un pivot. Les enjeux sont principalement de deux ordres, économique et sécuritaire.
Sa position, que vous connaissez, dans le détroit de Bal-el-Mandeb, route commerciale majeure qui représente environ 40% du trafic mondial. L’enjeu est donc bien de la sécuriser et de garantir la liberté de circulation maritime.
La présence militaire française à Djibouti est unique, par le traité de défense unique en son genre, qui a d’ailleurs fait l’objet d’une déclaration d’intention des deux présidents, mais surtout par l’ampleur de la relation de coopération militaire et sécuritaire : la France soutient le partenaire djiboutien en matière de formation et de montée en puissance des capacités par exemple. La France participe aussi à la sécurité de la zone via la mission européenne Atalante qui lutte contre la piraterie en mer, ainsi que via des exercices conjoints avec les partenaires djiboutiens et internationaux.

La France a décidé de faire passer son aide publique au développement de 10 à 15 milliards d’euros. De quelle manière Djibouti pourrait-elle en bénéficier ? La France annonce investir activement dans le projet de grande muraille verte qui concerne onze pays du Sénégal à Djibouti. Quels sont les projets concrets que la France soutiendra ?
En effet l’aide publique au développement de la part de la France augmente, afin de répondre à des besoins et de soutenir au mieux nos partenaires. S’agissant de Djibouti, la France a confirmé sa volonté de poursuivre les efforts engagés par l’AFD et de consacrer au moins 40 millions d’euros en subventions à Djibouti pour 2021 et 2022, ce qui porte le total du financement français en aide au développement à Djibouti à plus de 100 millions de 2018 à 2022. Elle sera dirigée vers des projets dans les secteurs de l’assainissement, de l’eau, de l’enseignement supérieur, du numérique, de l’éducation ou encore de l’efficacité énergétique, tout en conservant bien sûr une attention particulière aux activités de promotion de la francophonie notamment au travers des formations.
Je souligne également de nouveaux champs prometteurs comme la coopération décentralisée avec la Région Sud, ou la promotion de l’égalité femmes/hommes à Djibouti.
Concernant la Grande Muraille verte, qui s’étend de la réserve de Doudah à Dakar, la France soutient l’accélérateur de la GMV (A-GMV) dans un esprit de lutte contre le changement climatique, la conservation de la biodiversité, la gestion durable des terres, avec des bénéfices pour la sécurité alimentaire et de développement.

La France va ouvrir progressivement ses frontières le 15 juin. Faudra-t-il présenter un passeport vaccinal, un simple test PCR négatif ou respecter une quarantaine ? Par ailleurs, sur 1,1 milliard de vaccins inoculés jusqu’ici dans le monde, seuls 18 millions l’ont été en Afrique selon une information Le Monde du 7 mai. Comprenez-vous que le programme Covax puisse être perçu comme un alibi des pays riches qui ont préempté des milliards de doses de vaccins contre le Covid-19. Ne rendent-ils pas ainsi impossible pour les pays du Sud de s’approvisionner en vaccins ? Alors que la pandémie, ses évolutions et ses conséquences sont mondiales, la solidarité internationale ne semble-t-elle pas en fait prendre la forme du chacun pour soi ?

La France travaille à la réouverture en toute sécurité de ses frontières, autant pour les nationaux que pour les étrangers. Les conditions d’entrées sont réévaluées très régulièrement pour concilier sécurité sanitaire et liberté de circuler.
Le traitement de la pandémie constitue un enjeu essentiel de santé publique et doit faire l’objet d’une approche solidaire et multilatérale. En ce sens, la France soutient une répartition équitable et rapide des vaccins via l’initiative Covax mais aussi par un plaidoyer dans les instances comme le G7, pour une intensification des politiques de solidarité vaccinale. En plus des financements que nous apportons à Covax, le président de la République a annoncé que la France donnerait à l’initiative 5% des doses qu’elle a commandées à titre national.
Il s’agit également de soutenir les institutions africaines et les outils africains de gestion de la pandémie, en particulier le CDC Africa, mais aussi le réseau des instituts Pasteur situés en Afrique de l’Ouest, de l’Est, centrale et australe, qui est aujourd’hui une ressource clé pour identifier et contenir le risque des variants.

Propos recueillis par Mahdi A.
Photo ambassade de France à Djibouti.

 
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