Human Village - information autrement
 
Human Village interdit de publier sur les Forces françaises stationnées à Djibouti
par Mahdi A., mai 2024 (Human Village 51).
 

Intéressé par les questions sociales, économiques et internationales aussi loin que je m’en souvienne, et souhaitant valoriser le particularisme djiboutien dans la région, j’ai créé le magazine Human Village en 2007 pour informer et réfléchir sur les évolutions qui structurent notre vie quotidienne et notre avenir, et sur des sujets d’intérêt général.

Face aux contraintes économiques, j’ai ensuite transformé le titre en un site gratuit accessible sur internet, alimenté par des informations en libre accès sur le web, des contributions volontaires extérieures et des analyses personnelles. Mon objectif était de mieux partager des réflexions sur notre pays et la région, mais aussi de permettre à toutes et tous de soumettre des textes concernant la vie de la cité. Ces descriptions, commentaires ou analyses sont informés par le quotidien, des événements nationaux ou internationaux, ou l’expression d’opinions argumentées, mais ils sont toujours rédigés de façon mesurée. Il ne s’agit pas d’être neutre, mais de satisfaire aux valeurs d’indépendance, de démocratie et de préservation de l’environnement que porte le journal, avec objectivité et respect des autres dans un débat ouvert. Human Village n’est pas un réseau social incontrôlé, les textes doivent être validés par la rédaction avant d’être publiés.

Bien que Djibouti soit souvent décrit dans la presse internationale comme une « démocratie forte », nos publications - écrits, poèmes, commentaires, analyses, comptes rendus, témoignages - ont été diffusés plutôt librement. Évidemment, Human Village n’est pas Mediapart. Nous n’avons pas de moyens réels d’enquête, nous mobilisons principalement des informations publiques. Nous sommes par ailleurs très attentifs à ne pas pouvoir être instrumentalisés par d’éventuelles opérations de déstabilisation, ce qui peut nous amener à nous limiter, ce que l’on pourrait qualifier d’autocensure mais qui est une nécessaire compréhension de la complexité de la situation du pays.
Il m’a été cependant parfois suggéré, de façon plus ou moins appuyée, d’arrêter la publication d’Human Village. Il y a même eu quelques propositions de rachat… du site bien sûr. Mais dans l’ensemble, Human Village a pu poursuivre son bout de chemin, vaille que vaille, respectant la loi tout en restant ferme sur ses convictions. Il refuse les invectives, les dénonciations non appuyées sur des sources fiables et sérieuses, et tous les propos diffamatoires ou injurieux. Nous veillons à nous appuyer sur des informations fiables, des articles de presse de qualité, pour livrer des analyses ou des réflexions argumentées sur les sujets qui nous semblent importants.

Évolution du nombre de visites annuelles du site

Human Village est un média engagé dans la liberté d’expression et le respect des autres, dans le cadre établi par l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme : « Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. » [1].
Le concept semble plutôt bien fonctionner. À la date d’aujourd’hui, le site affiche plus de 850 000 visites durant les huit ans d’existence de la version numérique, avec une moyenne actuelle d’environ 500 visiteurs uniques quotidiens. Ces chiffres prouvent que le contenu que nous produisons intéresse aussi bien à Djibouti que dans le monde.
Jour après jour, mois après mois, vous êtes de plus en plus nombreuses et nombreux à nous lire. Nous tenons à vous en remercier. Et nous vous rappelons qu’Human Village appartient à celles et ceux qui ne souhaitent plus être simplement spectateurs, mais veulent agir pour améliorer la vie de tous les habitants en apportant leur pierre à la vie de la cité !

Répartition des visites selon les rubriques

Regroupant 330 des 1177 articles publiés sur le site, la rubrique « internationale » semble très appréciée. Elle représente près d’un quart du total des pages visitées. La géopolitique intéresse donc les lecteurs autant que moi. Est-ce la cause d’un récent incident ?

Le 14 mai dernier, il m’a été signifié de façon assez vigoureuse que mes articles récents sur l’état d’avancement de la négociation de l’accord de coopération et de défense franco-djiboutien « dérangeaient fortement » des organismes français présents à Djibouti, sans préciser lesquels : diplomates de l’ambassade de France - Dana Purcarescu ? -, militaires de la DGSE, le commandement des Forces françaises stationnées à Djibouti (COMFOR) Laurent Boïté, intérêts privés ? Ces publications ont été accusées de participer au développement d’un sentiment anti-français sur le territoire, d’être orientées pour nuire à l’image et aux intérêts français dans le pays. Mes interlocuteurs en concluaient que Human Village était sous la coupe d’une puissance étrangère rivale de la France…
Les bras m’en sont tombés. Depuis sa création et jusqu’à un passé très récent, Human Village était au contraire souvent décrié comme un outil au service de l’influence française. Me voilà maintenant accusé d’être manipulé par des intérêts chinois, russes, voire, qui sait, iraniens… On peut penser qu’être accusés de soutenir autant les uns que les autres, et surtout les autres, montre en fait que nous sommes au bon endroit et que nous faisons notre travail comme il faut.

Graphique Ouest France

Bref, il m’a été intimé de ne plus écrire sur les intérêts militaires de la France à Djibouti, puisque je serais sous l’influence, consciemment ou non, d’une puissance étrangère. Le discrédit ainsi porté sur mes publications ressemble à la pratique consistant à qualifier d’antisémite toute critique portée contre la politique israélienne. Jusque là pourtant, les interventions de l’ambassade de France à Djibouti sur le contenu du journal se sont limitées à des remarques sur quelques publications. Nous les avons accueillies avec bienveillance et compréhension, effectuant souvent les modifications suggérées, allant jusqu’à dépublier un texte pourtant strictement factuel pour ne pas créer de difficultés… L’ambassade a par ailleurs financé ma participation en 2023 à un « festival de journalisme » organisé en France par Le Monde. Il me semblait donc que nos relations, franches et ouvertes, étaient cordiales.
Il se trouve que j’ai vécu plus d’une vingtaine d’années en France, où j’ai fait mes études, que mes publications sont en français, et que de nombreux chercheurs académiques français, spécialisés dans les questions régionales, publient dans les colonnes du journal. Nous sommes bien loin de « l’Axe du Mal »…

Je ne peux pas accepter une mise en cause aussi invraisemblable, injuste et stigmatisante, qui compromet aussi les miens. Je tiens à assurer les lecteurs et les lectrices d’Human Village qu’aussi longtemps que les données en open source seront aussi nombreuses, nous continuerons à publier des analyses sur les questions militaires ou géostratégiques en Afrique, qu’elles soient nôtres ou émanent d’autres institutions.

Pour contribuer à ma défense, et à celle d’Human Village, j’espère qu’un ministre influent me pardonnera de révéler un instant d’une discussion privée de 2021. Bien qu’initialement dubitatif sur l’intérêt des publications d’Human Village, il avait alors fait un mea culpa et affirmé que ce n’est pas un Human Village qu’il faudrait pour Djibouti, mais dix. Pour lui, en effet, les responsables politiques nationaux avaient constamment le nez dans le guidon. La gestion quotidienne des urgences, particulièrement dans un portefeuille ministériel aussi sensible que le sien mais plus généralement dans tous les secteurs, ne leur laissait pas toujours le temps et la disponibilité intellectuelle suffisants pour prendre le recul nécessaire sur de nombreux sujets. Il ajoutait même que c’est un peu Human Village qui l’avait incité à créer une institution dédiée à la prospective, afin de nourrir en réflexions et analyses son département ministériel.

Merci encore pour votre lecture et votre soutien, et à très bientôt, chers lecteurs et chères lectrices.

Mahdi A.

Ajout juillet 2024 : Le général de division aérienne du corps des officiers des bases de l’air Laurent Boïté est nommé chef de la division "stratégie numérique des armées" de l’état-major des armées, à compter du 15 août 2024.

Le général de brigade aérienne du corps des officiers de l’air Sébastien Vallette est nommé commandant des forces françaises stationnées à Djibouti et commandant de la base des forces françaises de Djibouti, à compter du 15 août 2024.[Décret du 1er juillet 2024 portant affectation d’officiers généraux, Légifrance, 1 juillet 2024.]]


[1Voir le texte de la Déclaration universelle des droits de l’homme sur le site des Nations unies.

 
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