Human Village - information autrement
 
Laurent Taylor, traiteur-boulanger-pâtissier
par Mahdi A., février 2019 (Human Village 35).
 

Human Village souhaite se saisir de la visite, le 11 mars prochain, du président de la République Française, Emmanuel Macron à Djibouti pour questionner la relation entre les deux pays, à travers des portraits de français établis à Djibouti-ville, des rencontres avec des poètes, auteurs, universitaires locaux qui publient dans la langue de Molière, mais aussi, sous un angle plus politique, un entretien avec l’ambassadeur de France à Djibouti, Christophe Guilhou.

Tout plaquer pour se lancer dans le métier de bouche à son compte, à Djibouti, Laurent Taylor ne l’avait jamais envisagé… Hasard de la vie ou signe du destin. Cette contrée dit-il, il ne peut plus s’en défaire, et ne se verrait pas vivre ailleurs ; au point de se qualifier de « franco-djiboutien »... et ce d’autant plus que l’élue de son cœur n’est nulle autre que l’ambassadrice du cinéma djiboutien, Lula Ali Ismaël, qui, au moment même où nous publions ces quelques lignes, présente hors compétition son long métrage Dhalinyaro au Festival panafricain du cinéma (Fespaco), à Ouagadougou au Burkina Faso.

Les débuts de cette aventure professionnelle à Djibouti ?
Je suis arrivé à Djibouti en 2008, dans le cadre d’un parcours militaire de 2008 à 2012. Militaire de carrière, sous officier dans l’armée française au 5e RIAOM. Gérant de cercle mess dans l’armée de terre. Le cercle mess, c’est tout ce qui est en rapport avec la restauration militaire et la cuisine collective. Dans le cadre de mon travail au sein de l’armée, j’ai pu acquérir une connaissance aujourd’hui très utile du secteur de la distribution et de l’approvisionnement à Djibouti. Je connaissais le prix de chaque produit, j’avais pu acquérir par la force des choses une bonne perception des possibilités d’achats, des disponibilités sur place des produits quel qu’ils soient. À ce moment je n’envisageais absolument pas de quitter l’armée pour me lancer dans le privé. Je dois quand même dire que je me sentais très bien à Djibouti, surtout après ma deuxième année. Djibouti, c’est particulier. J’ai vécu au Gabon, Sénégal, Mauritanie, Nouvelle Calédonie, et visiter d’autres destinations dans le cadre d’opérations ponctuelles plus courtes, aucun de ces pays ne m’a donnés envie de m’y établir. Aucun ne m’a donné le sentiment de m’y sentir comme chez moi. Pour la petite histoire, j’y ai rencontré mon âme sœur quelques années après mon établissement.

Comment s’est effectué le basculement ?
Il n’était pas dans mes projets de quitter l’armée, comme j’ai la passion de la cuisine, cela m’amusait de réaliser des mets, des petites entrées, des verrines en apéro entre autres, pour des repas entre collègues. Un ami médecin militaire qui avait apprécié mes verrines, m’en avait commandé un certain nombre pour les faire découvrir à ses amis. Mes verrines ont eu un tel succès auprès des convives que, quelques jours plus tard, j’ai reçu un appel d’une des personnes présentes à cette réception pour me convier à sa résidence. Je dois dire que c’est une magnifique demeure : j’étais impressionné par les lieux. Là l’aimable dame me commande 3000 verrines amuse bouche… Il faut savoir qu’à ce moment précis alors que j’ai accepté la commande, je me lançais dans un défi, puisque je n’avais ni matériel ni produits pour les réaliser, et encore moins de chambre froide pour conserver une telle quantité de produits. De la folie à réaliser, mais aussi un beau challenge pour se faire connaître. J’ai évidemment rameuté mes collègues cuisiniers de l’armée pour m’aider à tenir les délais… La véritable difficulté résidait dans le fait qu’à la même date, j’étais responsable de la restauration du Grand Bara. Il faut y emporter tout le nécessaire par camion, installer des cuisines en plein désert, les produits… C’est la semaine la plus chargée de l’année pour mon service, c’est vraiment une période stressante, où on ne sait plus où donner de la tête.

Il m’a fallu réaliser sur deux nuits les verrines en rentrant la nuit sur la base, repartant aux aurores pour le Grand Bara. Il ne fallait pas rater le coche, cette première commande était très cruciale. La verrine a été un formidable produit d’appel. Pour stocker mes premières verrines, j’ai utilisé les frigos de l’armée… et livré la commande avec le camion frigorifique de l’armée à 17h en m’absentant du Grand Bara juste le temps de la livraison. C’était assez ubuesque, quand j’y repense : j’avais changé de tenue pour me mettre en civil, alors que je conduisais un engin militaire ! À partir de là, la mayonnaise avait pris, le gratin de Djibouti avait eu l’occasion de découvrir mes verrines. Personne d’autre que moi ne proposait ce produit à Djibouti en 2012. Ce n’est pas un produit raffiné, ou exceptionnel, mais c’était inédit et les convives présents sont tombés sous le charme. Les commandes par la suite n’ont pas cessé d’affluer. J’ai été agréablement surpris par l’engouement. Il a fallu que je commence à m’équiper, à recruter des petites mains pour m’épauler dans la préparation des produits. On travaillait dans mon petit studio militaire en dehors des heures de service.

Peu après l’ambassadeur de l’Union européenne me contacte pour me confier le service de traiteur service compris… Aussi bien salé que sucré. C’est un nouveau défi. J’enrôle certains de mes collègues ainsi que des amis djiboutiens que je forme au service ! Tout aurait été pour le meilleur des mondes si le commandant des forces françaises stationnées à Djibouti n’avait été invité, ainsi que mon supérieur direct, le commissaire… Avec mes collègues militaires, on ne roulait pas des mécaniques. On a essayé de se faire le plus petit possible, il y avait du monde, on pensait qu’il était peut être possible de ne pas se faire remarquer. C’était se méprendre ! L’ambassadeur très heureux du service et des mets servis, et pensant bien faire, est venu jusqu’à moi, accompagné de la haute hiérarchie militaire française, pour présenter le traiteur de la réception. Sur le coup ils m’ont salué cordialement. Plus tard dans la soirée mon commissaire m’a pris à l’écart, demandé ce que je faisais là… Je lui ai répondu benoîtement que j’aidais des amis qui débutaient une activité dans la restauration… Le lendemain je me suis rendu à son bureau pour l’informer que j’avais crée une petite société dûment immatriculée à Djibouti pour des services de traiteurs. Et que j’effectuai ces activités en dehors de mes heures de services. J’ai bien fait d’avoir joué franc jeu, car quelque temps après, je faisais le traiteur chez le général ! J’étais toujours militaire, mais comme je m’acquittais de mes tâches de manières irréprochables, je crois que mes supérieurs ont fermé les yeux… sur mes activités en dehors de la base. J’ai continué ainsi encore un an, l’affaire commençant à prendre considérablement de l’essor, j’ai décidé de prendre un congé sans solde de l’armée afin de me lancer dans l’aventure à plein temps. Je dois tout à l’armée française.

Qu’est ce qui favorise ce succès ?
Je proposais quelque chose de nouveau à Djibouti. Le traiteur haut de gamme avec des recettes légères, et surtout inédites. Je me suis spécialisé dans les amuse-bouche, les mini-sandwiches, les verrines ; tous ces produits à la façon française. Le but n’était pas de copier ou de reproduire des produits disponibles ici, mais d’amener quelque chose de chez moi, et de dire je sais faire cela et est-ce que cela vous intéresse, bref de diversifier l’offre. Mes interlocuteurs étaient intéressés, mais bon j’étais toujours militaire à mes débuts et je faisais cela à côté de mes activités militaires. Pour moi cela a été une période test, afin de voir si je puis dire le poisson mordait, et effectivement il mordait au delà de mes attentes.

Dans le secteur civil cela n’a pas cessé de se développer. Le bouche à oreille a très bien fonctionné et petit à petit j’ai enchainé les commandes et me suis équipé et organisé en conséquence. C’est la verrine qui a fait ma promotion et m’a fait connaître. La clientèle djiboutienne a soif de nouveauté. La classe moyenne supérieure veut offrir à ses convives des produits originaux. Pour les satisfaire il faut constamment se renouveler, innover sans cesse, de façon à proposer d’un cocktail à l’autre, toujours de nouveaux arômes, de nouvelles douceurs… C’est ce qui fait la différence. Je ne propose pas les produits disponibles chez mes concurrents. D’ailleurs je ne les vois pas comme des concurrents, et j’ai réussi à les convaincre qu’il était important que nous travaillions ensemble afin de s’entraider, comme se vendre des intrants lorsque l’un est en rupture et en attente de son arrivage, etc. On se commande des produits chez l’un ou l’autre, pour répondre à une commande urgente et importante. Cela fonctionne plutôt bien entre nous.

Avez-vous rencontré des difficultés pour ouvrir un commerce à Djibouti ?
Non absolument pas. Ici on t’interdit rien. À partir du moment où l’on respecte la réglementation. Même je pourrais ajouter qu’en tant que français, on est vraiment bien reçu. Pour ouvrir ma société je me suis rendu à la Chambre de commerce pour m’informer. J’étais encore militaire et je ne savais pas si c’était possible. La dame qui m’a reçu a été formidable : elle se nomme Kafia Abdourahman Cheik si j’ai bonne mémoire. Elle m’a informé avec clarté sur les démarches à entreprendre pour créer son entreprise privée à Djibouti ; elle m’a guidé pour chaque étape, en deux ou trois jours, c’était plié. Maintenant avec le guichet unique – qui n’existait pas en 2012 - c’est encore plus rapide. Concernant la relation avec l’administration fiscale, je n’ai jamais rencontré de difficulté particulière. Cela fonctionne comme partout ailleurs dans le monde, il faut fournir les résultats comptables aux impôts, déclarer sa TVA, s’acquitter de la part patronale et salariale auprès de la CNSS, etc.

Quel bilan tirez-vous de votre expérience professionnelle à Djibouti ?
Ce pays est formidable ! Le plus frappant, c’est la chaleur humaine, la gentillesse de la population djiboutienne. J’insiste là dessus on y est très bien accueillis en tant que Français. Je peux aller dans n’importe quel quartier, partout l’accueil est le même. Je constate que la présence des américains, japonais, allemands, ou des autres contingents étrangers, n’a en rien modifié l’intensité des liens qui unissent les Français avec les Djiboutiens. Il y a de belles opportunités pour les Français à Djibouti. Par exemple, dans mon secteur je bénéficie sans aucun doute de la réputation de la gastronomie française. Elle est très appréciée ici. 95% de ma clientèle est djiboutienne, c’est elle qui fait tourner mon commerce.

Par exemple, j’ai réintroduit la baguette française à Djibouti, et cela était très attendu après la fermeture de la boulangerie de France dans les années 2000. La baguette « à la française » a fonctionné du tonnerre. On la vendait alors à 200 FDJ pièce ; ce n’est absolument pas une concurrence à la baguette vendue à 25 FDJ. C’était pas le but de ma démarche. Je ne cherche pas à enlever le pain de la bouche des boulanger locaux. Mais une forte demande était là, de la part d’une clientèle désireuse de renouer avec la « baguette française ». Il fallait répondre à cette demande. Je propose des brioches, de la viennoiserie, du pain de mie, aux céréales aussi comme le bis, le complet, le seigle, au son, et des spéciaux comme à la graine de fuchsias très appréciée pour une clientèle diabétique. Cette gamme de produits variée permet de proposer une alternative à ceux qui ne connaissaient que le pain de campagne.

Que diriez-vous à vos compatriotes qui sont tentés que par l’Afrique de l’Ouest ?
Personnellement je n’avais rien programmé ; j’ai saisi une opportunité. Un Français qui s’installe à Djibouti n’est pas perdu. Le système administratif n’est pas éloigné du nôtre.
Prenons l’exemple de Dakar que je connais bien : les Français pourraient avoir l’impression d’être les rois du pays, les rois du monde, que tout est hyper simple. Cette impression est très trompeuse en réalité. Lorsque l’on rentre dans les affaires, cela peut devenir rapidement un enfer ! La concurrence y est très rude. A Djibouti, de prime abord, on pourrait croire que c’est l’inverse, en terme d’image, cela peut sembler rude, compliqué, aride, une population moins avenante… C’est une fausse impression ! Et c’est sans doute l’une des choses les moins connues sur Djibouti, c’est un super pays pour y faire des affaires. Il n’y a qu’une obligation, il faut faire des efforts pour s’insérer dans la population. Selon moi, il n’y a pas un pays plus facile pour y faire des affaires. C’est à mille lieux du Sénégal. D’ailleurs il n’y a qu’à voir le nombre de Sénégalais présents ici pour s’en convaincre. Le contraste est étonnant. À Djibouti, il faut oser ! Il faut rentrer dedans, il ne faut pas avoir peur. Je conseille aux français de passage à Djibouti de se poser place Menelik ou place Lagarde, de s’y asseoir tranquillement. On ne peut être que conquis. Le contact est aisé, particulièrement pour les Français, nous y sommes très appréciés ici, c’est indéniable. Par contre il faut le savoir, il n’est pas possible de vouloir y prospérer en vivant à l’écart des Djiboutiens, à côté d’eux… Il ne sera pas possible de faire du négoce avec eux sans établir de liens, ou faire montre de son attachement à la beauté de ce pays, et encore plus de sa culture. Il faudra chercher à s’intégrer, à comprendre, s’imprégner de la mentalité et des mœurs locales … C’est une évidence pour moi. Pareillement pour créer des liens d’amitié, partager des moments de festivités, comme les mariages, les fiançailles, des repas dans des restaurants où l’on sert de la viande, voire du poisson yéménite, il faut faire le premier pas, y aller sans préjugé. On dit souvent de Djibouti que c’est une terre d’échange et de rencontre, mais bon, il arrive que des étrangers quittent le pays sans avoir jamais échangés ou rarement liés d’amitié avec des Djiboutiens… C’est incompréhensible !
J’ai eu la chance d’aller à Hargueissa en Somaliland, pour prospecter le marché. J’ai vécu des expériences extraordinaires dans ce pays, juste en une dizaine de jours. Je rêve d’y installer une branche de O’Délices. La chaleur humaine est très forte, la population très avenante et accueillante. Ne parlant pas encore le somali, j’ai pu communiquer en anglais. Je m’y suis rendu avec des échantillons de mes produits faisant presque du porte à porte, me présentant chez les principaux commerces, et là je dois dire que cela a été l’emballement. Le potentiel est énorme pour les produits français, les personnes rencontrées voulaient être immédiatement livrées. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, mes principaux interlocuteurs là-bas étaient des Djiboutiens… Ils connaissaient déjà mes produits, donc cela facilitait d’autant la prise de contact. La confiance était de mise. Pareillement l’Érythrée me semble un pays très prometteur. L’Éthiopie, c’est plus compliqué comme environnement, ce n’est pas une priorité pour moi dans l’immédiat.

Des difficultés pour trouver tous les intrants sur le territoire ?
Le fait de devoir importer l’essentiel des intrants n’est pas très commode. L’approvisionnement, on nous dit, qu’il y a Dubaï à côté, mais Dubaï, c’est très cher. Lorsque l’on veut acheter en Europe, on rencontre les mêmes difficultés, les intrants de qualité sont coûteux, le change de l’euro peut devenir rapidement très élevé, à cela s’ajoute le coût du transport, des frais de douanes qui ont augmenté, d’électricité élevés… C’est pas toujours évident de maintenir des prix accessibles, avec des produits de qualité, c’est un défi mais que je m’attache à le relever. On ne peut y parvenir qu’en réalisant de très faibles marges qui ne nous permettent pas de développer l’emploi.
Je suis attaché à fabriquer un produit de qualité, accessible à tous. C’est mon ambition.

J’ai des clients que je soutiens comme à Balbala, ou des jeunes filles supers motivées qui sont venues frapper à ma porte pour s’enquérir de mes prix aux revendeurs. J’ai apprécié qu’elles aient eu « l’audace » de frapper à la porte alors que je peux être considéré comme un artisan avec des prix pas donnés localement. On fait affaire ensemble : je leur donne des petits gâteaux à l’ananas pour leur clientèle gratuitement, le temps de faire connaître le produit. Elles me prennent des pains aux céréales, des pâtisseries, dont des forêts noires… J’essaye d’adapter mes tarifs aux moyens de leur clientèle de Balbala. Pour les gâteaux à l’ananas, après la période de démarrage, j’envisage de leur vendre à 80 FDJ, pour qu’elles puissent les revendre à 100 FDJ. Auparavant elles n’avaient à proposer que les gâteaux à la vanille bien connus à Djibouti, à 60 FDJ. Achetés 40 FDJ donc avec une marge de 20 FDJ mais avec des ingrédients pas nutritifs, peu nourrissants. À contrario, ma farine importée, est riche et de qualité. Le produit qu’elles vendent est sans doute très bon au palais mais est-il sain, nutritif pour le consommateur ? Si tu manges une tranche de pain de mie, il faut que cela t’apporte nutritivement, Les gens même à Balbala veulent mieux manger mais ils n’en ont pas les moyens. C’est la raison pour laquelle je réfléchis à comment parvenir à fabriquer des produits à 50 ou 100 FDJ au chocolat par exemple. Si je parviens à résoudre cette équation, ce n’est pas uniquement à Balbala que je distribuerais, mais la sous région, l’Érythrée, le Somaliland. Pas uniquement à Djibouti. La barrière c’est le coût des intrants, maintenant j’essaye de voir le problème autrement, avec ces produits là : lait, huile, farine, chocolat, voire ananas, ou autres. Comment puis-je réaliser un produit accessible à un plus large public, sans mégoter sur la qualité ? Les prix des produits sont incompréhensibles. Comment amender les recettes, comment les ajuster aux moyens de la clientèle ? On ne peut pas enlever la pauvreté mais on peut essayer de réfléchir à comment les aider à avoir une alimentation plus saine. Des enfants mieux nourris cela doit être possible : lorsque je vois les enfants consommés des saboussas, ou autres beignets baignant dans l’huile devant l’école le matin, ou dévorant des gâteaux pas chers et peu nutritifs, je me dis qu’ils ne se nourrissent pas avec ce qu’ils ingurgitent. On leur créé des problèmes de santé pour demain. Ce n’est pas une alimentation équilibrée.

La formation du personnel est-elle de qualité ?
C’est difficile sur ce point ! Personnellement j’ai du mal à comprendre des jeunes de 20 ans qui se dise fatigués de travailler en position debout dans le milieu de la boulangerie… Ça n’existe pas en France ce type de revendications ! Chez trop peu on trouve la volonté de se surpasser, la niaque, l’ambition de progresser, de se dépasser, de s’investir dans sa tâche. Sans doute l’enseignement professionnel a-t-il un rôle à jouer pour rendre les employés plus investis dans leur travail.
Je me suis constitué une solide équipe, composée d’une trentaine de personnes, pour l’essentiel ils sont avec moi depuis six ou sept ans. Je continue tout de même à former car je suis dans une phase d’expansion de mes points de vente. Malheureusement, sur dix stagiaires inscrits en stage dans mon entreprise, il est rare que plus d’un soit retenu et fasse l’affaire. C’est dommage car c’est une perte de temps considérable. Il arrive parfois de doubler certains postes pour pallier aux risques d’absence. C’est des coûts. Je pourrais faire comme mes concurrents et de recruter des étrangers d’origine philippine, thaïlandaise, sénégalaise, indienne, déjà formés, mais j’ai fait le choix de faire travailler la main d’œuvre locale, de les former sur le tas, c’est plus dur mais c’est aussi plus rentable à la longue lorsqu’on veut investir dans le long terme. D’ailleurs mes employés ont de bons réflexes. Quand j’ai un problème, c’est vers eux que je me tourne et souvent l’un d’eux trouve la solution la plus appropriée. Cet investissement en temps commence à porter ses fruits. Cela ne sert à rien de crier, ou de sanctionner, il faut expliquer pourquoi on doit faire les choses ainsi, pourquoi c’est important.
Mes employés attendent après moi un savoir faire, ils ne veulent pas seulement un salaire. Des difficultés il y en a partout dans le monde, sauf que pour un étranger, les difficultés peuvent se multiplier par deux, parce qu’il y a beaucoup de choses à affronter à comprendre, mais justement lorsque tu es un challenger ce sont les difficultés qui font grandir. C’est l’attrait aussi de l’expatriation.

Le président de la République Française, Emmanuel Macron est attendu à Djibouti : un message à lui transmettre en dehors de ceux déjà largement diffusés par les Gilets jaunes ?
Juste un mot : je voudrais saluer l’efficacité de l’Agence française pour le développement (AFD). C’est un formidable outil d’accompagnement pour les Français intéressés par l’expatriation et porteurs de projets économiques. Si le gouvernement français souhaite démultiplier le maillage des entreprises françaises sur le continent, il doit savoir que sur le terrain cet instrument a fait mouche dans la qualité de son accompagnement auprès des professionnels. Une partie du succès de mon entreprise, je le dois à l’AFD. Elle a contribué de manière déterminante au démarrage mais également à l’essor de ma société. Il n’y a pas photo : si l’on veut renforcer intensifier la présence de la France ici ou ailleurs sur le continent, c’est un des véhicules sur lequel le gouvernement devrait mettre l’accent.

Propos recueillis par Mahdi A.

 
Commentaires
Laurent Taylor, traiteur-boulanger-pâtissier
Le 24 février 2020, par Gorce.

Bravo m. TAYLOR.
Vous êtes un professionnel compétent,
et un vrai chef d entreprise inventif qui mise sur le long
terme et qui comprend les personnes et le pays où il travaille.
Vous prouvez que la réussite dans le domaine économique ne s appuie pas seulement sur les critères de rentabilité à court terme si elle veut être durable et avoir un impact pour l ensemble de la société

 
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