Human Village - information autrement
 
Mécénat chirurgie cardiaque : un coup de cœur
par Mouna Frumence, juin 2011 (Human Village 16).
 

Créée en 1996 par le professeur Francine Leca et Patrice Roynette, l’Association Mécénat chirurgie cardiaque enfants du Monde permet à des enfants souffrant de malformations cardiaques et venant de pays défavorisés de subir une opération en France quand cela est impossible chez eux pour faute de moyens techniques et financiers. Hébergés par des familles d’accueil bénévoles, ces enfants sont opérés dans 8 centres de chirurgie cardiaque pédiatrique (Paris, Angers, Tours, Lyon, Marseille, Nantes, Bordeaux et Toulouse, ndrl). Nous avons eu le privilège de nous entretenir avec une mission de l’Association en séjour à Djibouti pour quelques jours. Rencontre avec le docteur Daniel Czitrom, cardiologue-pédiatre, Mme Maïck Clouard-Legray, en charge de la coordination avec les familles d’accueil, M. François Babou, directeur financier du Mécénat ainsi qu’avec le docteur Pierre-Laurent Massoure, cardiologue à l’hôpital militaire Bouffard et correspondant de l’association à Djibouti depuis 3 ans…

D’emblée, le docteur Daniel Czitrom nous explique que depuis la création du Mécénat, il y a maintenant 15 ans de cela, plus de 1500 enfants du monde entier ont bénéficié d’une chirurgie cardiaque. En 2010, 180 enfants ont été opérés ce qui témoigne d’une demande et d’une activité croissante de l’association. « D’année en année, le nombre d’enfants augmente doucement mais indiscutablement. Et le prix d’une opération avec son séjour hospitalier coûte en moyenne 10 000 euros pour une intervention ». La moyenne d’âge de ces enfants varie d’un à quinze ans. Ce sont des tout petits qui bénéficient le plus de ces interventions, avant l’évolution vers des lésions irréversibles. Parfois des enfants de moins de un an bénéficient de cette prise en charge à condition qu’ils soient sevrés car la famille ne voyage pas avec l’enfant.
Par ailleurs, nous apprenons que cette association humanitaire française couvre essentiellement les pays d’Afrique mais pas exclusivement. Mécénat soigne également des enfants du Laos, du Cambodge, du Pérou, Mongolie, Irak, etc. « Nous répondons présents à tous les pays qui nous sollicitent et dans lesquels nous effectuons des missions ». A Djibouti, sept enfants entre 2 et 13 ans ont déjà bénéficié d’une intervention qui a été un succès chaque fois.
Ensuite, c’est avec force détails et précisions que le Dr Czitrom entreprend de nous expliquer comment un enfant souffrant vient à être pris en charge par Mécénat. Le principe est donc le suivant. Les enfants sont sélectionnés sur place par des médecins, soit des cardiologues soit des pédiatres. Ces derniers diagnostiquent une anomalie ou une malformation cardiaque qui nécessitent une correction chirurgicale. Les dossiers sont envoyés en France à l’association et sont priorisés en fonction de la gravité et des possibilités chirurgicales. Parfois, comme cela a été le cas en mars 2011 à Djibouti, une mission se déplace dans les pays demandeurs. Les enfants sont ensuite examinés par cette mission qui comporte deux ou trois personnes dont un cardiologue-pédiatre autrement dit un cardiologue spécialisé dans la prise en charge des enfants. En venant sur place, ce cardio-pédiatre s’attache à vérifier deux choses. En premier lieu, il vérifie si l’enfant est susceptible d’être pris en charge parce qu’il a une maladie cardiaque qui nécessite d’être opérée. Il vérifie en second lieu si une seule opération sera suffisante pour permette à l’enfant de récupérer un cœur avec lequel il pourra vivre normalement. Lors de cette mission à Djibouti, huit nouveaux cas recrutés à l’hôpital Bouffard et en cardiologie à l’hôpital Peltier (Dr Said God et Dr Ibrahim) ont été retenus pour une chirurgie cardiaque.
Pourquoi cette sélection ? Pourquoi ce choix ? « Parce qu’il existe un certain nombre de maladies cardiaques, congénitales, qui ne sont pas curables de façon définitive » nous répond le médecin. Ce tri étant obligatoire, le choix est donc assez simple. De deux maux, il faut choisir le moindre. Il précise que l’objet de la sélection et de la mission consiste à vérifier justement que « les maladies des enfants sont curables et que cette guérison peut être obtenue au prix d’une opération et d’une seule opération. En effet, on évite la prise en charge des maladies qui nécessitent plusieurs opérations. C’est la raison pour laquelle on privilégie les interventions chirurgicales curatrices en une fois de façon à pouvoir prendre en charge plusieurs enfants ». L’idéal bien sûr est que la pathologie de l’enfant ne nécessite plus de médicaments après son opération.
Au final, le problème est double. Le premier concerne évidemment la sélection des maladies qui sont curables de façon définitive après une unique opération même si la sélection n’est pas toujours simple à faire parce qu’il n’est pas possible de prendre en charge tous les enfants malades du coeur. Ensuite le second problème est qu’il n’est pas rare pour Mécénat d’être confronté à des enfants dont la maladie est très évoluée c’est-à-dire que la prise en charge est tardive. « Par conséquent, on se retrouve avec un gamin qui aurait dû être opéré bien plus tôt, déplore le cardiologue car plus le temps passe, plus le muscle cardiaque sera très abîmé, ce qui rendra les suites opératoires plus difficiles et compromettra à terme le succès de l’intervention ».
En plus, il faut prendre en compte d’autres paramètres non moins considérables qui ralentissent énormément l’intervention chirurgicale. Il s’agit des démarches et des contraintes administratives qui retardent la délivrance des visas dans certains pays, ce qui n’est pas le cas à Djibouti. Les exemples d’enfants qui attendent six mois voire un an pour avoir leurs passeports et visa sont nombreux. Or si l’enfant est déjà diagnostiqué à un stade avancé, ce délai peut le basculer dans « un état critique ». Le mieux consisterait donc à déceler le problème le plus tôt possible. Mais malheureusement c’est loin d’être le cas. La raison tient à un double obstacle.
Le Dr CZITROM souligne que d’une part l’accès aux soins pose un gros problème parce qu’en général ce sont des enfants très démunis et d’autre part, l’absence d’un personnel médical compétent sur place avec des connaissances en cardiologie et pédiatrie ne permet pas de diagnostiquer la maladie. Il faut savoir que les maladies cardiaques sont différentes chez l’adulte et l’enfant. Certaines sont semblables mais d’autres anomalies et malformations présentent des spécificités particulières à la fois chez l’enfant et l’adulte. « La cardiologie-pédiatrie est donc une formation à part. C’est une sous-discipline de la cardiologie avec de la pédiatrie spécialisée ». Et contrairement à la chirurgie cardiaque adulte, la chirurgie cardiaque infantile n’est pas courante, avec un manque patent des spécialistes en cardiologie-pédiatrie dans de nombreux pays. Pourtant, les possibilités de récupération sont largement supérieures que chez l’adulte parce que l’enfant est d’une plasticité extraordinaire, souligne le médecin.
Pour surmonter cet obstacle à la prise en charge, le Mécénat a pris l’initiative d’organiser depuis 4-5 ans un séminaire de formation annuel qui s’étale sur une durée d’un mois au bénéfice d’une douzaine ou quinzaine de médecins seniors autonomes (pas d’étudiants ou d’internes). Il s’agit soit des cardiologues soit des pédiatres qui ont fait la demande et dont le dossier est accepté.
L’Association leur propose ainsi un mois de formation en France tous frais payés où ils suivent des cours intensifs dans un centre de cardiologie-pédiatrie parisien. Ces cours sont dispensés par des professeurs et des praticiens hospitaliers. Autrement dit, des gens qui jouissent d’une grande expérience professionnelle dans la médecine et l’enseignement.
Ces séminaires sont d’une grande utilité. Ils permettent à ces médecins d’être formés et de repartir avec des rudiments et des notions permettant de diagnostiquer les anomalies cardiaques. Et une fois de retour, ces médecins vont servir de référence et assurer la liaison avec Mécénat en dépistant la maladie et en suivant les gamins une fois revenus dans leur pays d’origine.

Le déroulement de l’intervention chirurgicale
Globalement, le principe est que la prise en charge soit la moins coûteuse possible. Le séjour de l’enfant en France dure généralement de 6 à 8 semaines. Le processus est le suivant. Le gamin arrive dans sa famille d’accueil, il voit ensuite un médecin à l’hôpital. On prévoit une journée entière pour réaliser une batterie d’examens. Il s’agit de la journée marathon. Et ces examens sont souvent réalisés gratuitement grâce à la compréhension des différents services concernés (radiologie, échographie, scanner etc.). Ce bilan permet de vérifier si le diagnostic initial est le bon.
En effet, il est impératif de vérifier si le jeune patient n’a pas effectivement d’autres infections pulmonaires, dentaires ou autres qui nécessiteraient des soins préalables susceptibles de repousser la chirurgie. Ensuite, l’enfant retourne dans sa famille d’accueil avant d’être hospitalisé.
Enfin une date est fixée pour l’intervention chirurgicale. L’enfant arrive à l’hôpital le matin même, très tôt à 7h, de façon à ne pas payer une nuit d’hospitalisation supplémentaire. L’opération a lieu une heure plus tard. L’enfant sort généralement 4 ou 5 jours après l’opération, l’objectif étant d’écourter le plus possible son séjour à l’hôpital afin d’éviter des frais superflus (entre 1500 et 2000 euros par jour). En pratique, il passe une journée ou deux en réanimation, deux ou trois jours en service normal avant de rejoindre sa famille d’accueil. « Cela dit, on ne laisse sortir le gamin de l’hôpital que lorsque l’on est sûr qu’il n’y aura pas de problèmes » juge bon de préciser le cardiologue. « En outre, après sa sortie, l’enfant est astreint à un suivi très rapproché avec des visites périodiques à l’hôpital, deux ou trois fois par semaine ».
D’autre part, Mécénat veille à ce qu’il n y ait pas de différence, pas de distinction dans la qualité de la prise en charge des enfants. Chaque enfant malade est soigné de la même façon qu’un enfant français ou européen et en aucun cas comme un enfant venant d’un pays démuni. La garantie de soins est la même pour tous les enfants quelque soit leur origine.
Et puis l’intérêt est que l’enfant puisse mener une vie normale après une seule intervention chirurgicale. Il doit pouvoir jouer au foot avec les autres enfants de son âge, aller à l’école avec et comme les autres, etc. Le Dr Czitrom nous cite l’exemple de deux enfants qui allaient beaucoup mieux seulement 48 heures après l’intervention. Ils souffraient d’une « maladie simple qui s’appelle persistance du canal artériel, le canal artériel étant ce qui permet la circulation sanguine chez le foetus pendant la grossesse.
Normalement ce petit canal se ferme dans la semaine ou les heures qui suivent la naissance. Mais parfois il reste ouvert, ce qui induit une communication anormale ». Dans ce cas de figure, si le coeur est laissé comme ça, il fonctionnera anormalement et peut se fatiguer assez vite, et causer à terme la mort de l’enfant. Cette opération est pourtant ultra simple, ce canal étant très facile à fermer. Cependant d’autres opérations sont lourdes car les malformations cardiaques sont compliquées avec un risque vital clairement engagé.
Enfin il est à noter que le taux de réussite de ces opérations est très élevé. Le taux de mortalité est à contrario très bas et avoisine tout au plus les 5% et est dû le plus souvent à l’absence d’un suivi médical des enfants une fois de retour dans leur pays.

Des familles d’accueil bénévoles
Mme Maïck Clouard-Legray, chargée de la coordination avec les familles d’accueil prend le relais pour nous expliquer le rôle capital des familles d’accueil. Il est essentiel de retenir que tout est basé sur le bénévolat. Changer la vie d’un enfant à jamais pour lui permettre tout simplement de « vivre de la façon la plus normale qui soit » est un élément très motivant pour ces familles. A titre d’illustration, Mécénat est en contact avec 35 familles d’accueil rien que dans la ville de Tours, dans laquelle, on opère deux enfants par mois.
Le travail des familles d’accueil est remarquable. Chaque famille prend immédiatement en charge « son enfant » dès son arrivée à l’aéroport de Paris. Il y reste deux/trois jours afin de prendre ses repères. Malgré ce que l’on pourrait croire à priori, Mme Maïck affirme que les enfants ont une capacité extraordinaire d’adaptation. « Un enfant s’accoutume très très vite, nous dit-elle. Il est habitué au bout de deux jours ou trois jours seulement ».
Par ailleurs, l’expérience a démontré la création des liens affectifs très forts entre la famille d’accueil et l’enfant. « Pour les parents d’accueil, l’enfant représente un don et ils s’y attachent tout de suite comme s’il s’agissait de leur propre enfant ». Ce dernier est gâté par cette nouvelle famille qui l’emmène visiter la Tour Eiffel, Disneyland, etc. Il apprend également dans la foulée le français. « Le lien qui se crée entre l’enfant et la famille d’accueil est tellement impressionnant, poursuit Mme Maïck que nous sommes obligés de prendre des précautions comme le fait de prévenir toujours les parents d’accueils que l’enfant n’est pas orphelin et qu’il a déjà des parents qui l’attendent ».
De même, l’Association demande obligatoirement l’autorisation écrite, des parents de l’enfant à opérer, permettant aux parents d’accueil de prendre des photos de leur enfant afin de pouvoir les envoyer dans le pays d’origine et rassurer la famille. Enfin, en guise de souvenirs, la famille d’accueil constitue aussi à l’intention du gamin un petit album photo résumant son séjour en France. C’est une expérience humaine merveilleuse et très enrichissante à la fois pour l’enfant et la famille.
Et le jour du départ, c’est très souvent dans les larmes que les adieux se font autant pour l’enfant que pour les parents d’accueil.
Puis une convoyeuse vient chercher l’enfant chez la famille d’accueil pour l’accompagner en avion. Mais si l’enfant est gravement atteint, l’Association dépêche une convoyeuse médicale (infirmière) pour l’accompagner.

Le mode de financement de l’association
Si le but de Mécénat consiste à opérer bénévolement les enfants souffrant de malformation cardiaque, il faut savoir que la chirurgie cardiaque est extrêmement coûteuse. Le traitement fait appel à des techniques médicales très pointues et rodées, à des infrastructures très lourdes sans parler des frais de fonctionnement considérables.
François Babou, en sa qualité de comptable, nous informe que Mécénat est une association de bienfaisance. Par conséquent, seuls des fonds privés (concours généreux d’entreprises, mécènes, partenaires logistiques ou encore donateurs particuliers) permettent de financer les interventions des enfants. De plus, l’Association reconnue d’utilité publique organise ponctuellement des événements (concerts, soirées théâtres, événements sportifs, etc.) dont l’intégralité des bénéfices est consacrée aux soins des enfants.
Néanmoins, si l’opération reste gratuite pour chaque enfant, la famille biologique doit néanmoins prendre en charge le billet d’avion. Mais comme dans la plupart des cas, les enfants viennent des milieux assez démunis, c’est la famille au sens large qui met la main à la poche pour payer le billet d’avion. Souvent, pour alléger la facture, Mécénat demande également à Air France de collaborer et de faire un geste pour baisser le prix quand cela est possible. Des associations locales (Lions Club, Rotary Club, grandes entreprises locales…) peuvent contribuer si besoin aux frais de transport.
Rappelons tout de même que chaque intervention coûte 10 000 euros ! Chaque don, chaque geste est une part de vie offerte à un enfant. Mécénat a besoin de sponsors surtout lorsqu’on tient compte du nombre d’enfants opérés annuellement. Alors si vous voulez en savoir plus sur l’association, si vous voulez faire un geste pour rendre le sourire et la vie à des enfants malades, rendez-vous sur www.mecenat-cardiaque.org.

Mouna Frumence

 
Commentaires
Mécénat chirurgie cardiaque : un coup de cœur
Le 11 juin 2015, par Joel Mbokani.

Boujour. Je m’appelle Mbokani Joel, j’habite la RDC, je souffre de l’insuffisance mitral et il me faut une intervention chirurficale mais dans mon pays ce n’est pas faisanble il faut l’Europe et ma famille n’a pas la possibilité de me faire voyager. C’est pourquoi je vous demande de l’aide
Votre pris en charge sauvera ma vie
E-mail : Joelmbokani@yahoo.fr
Tel : +243 817031751


Mécénat chirurgie cardiaque : un coup de cœur
Le 3 décembre 2016, par aicha .

J’ai besoin d’un chirurgie je lis l’article sur l’association mecenat et je l’adorais votre facon de aide les gens c bien au moins il ya des gens qui savait qu’il ya des gens qui souffraient sur ce planéte et leur donne une chance de revivre une autre fois bref j’avais besoin d’une aide parce que dans notre pays la cnss ne se occupe par de la liste de thérapeutique de maladie grave soigné a l’etranger et bien sur avec une aide des frais de hopitalisation donc je voulais que vous m’aidiez si vous pouvez je prendrais la charge de frais de billet d’avion, de l’hopitalisation de hotel et une moitie de mon intervention chirurgicale, je suis étudiant, et ce dur pour mw de payer + que ca, alors vivre avec pr tt l’ éternité.
Mon mail : rayasaid975@gmail.com

 
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