Human Village - information autrement
 
DPFZA suspend les activités de l’ATD
par Mahdi A., avril 2020 (Human Village 38).
 

Le couperet est tombé sans férir jeudi 16 avril [1] : le président de l’Association des transitaires de Djibouti (ATD), Hassan Ahmed Doualeh, a été informé de la suspension de l’autorisation d’opérer dans le multimodal du groupement privé qu’il dirige, décision avec effet immédiat. Quel est le motif de cette sanction pour le moins radicale, qui depuis près d’une semaine a arrêté les activités d’une soixantaine de transitaires ?

« La raison qui nous a poussé à prendre une telle mesure à l’égard de l’entité que vous dirigez, est votre manque manifeste de coopérer dans la lutte contre la propagation du virus Covid-19. Comme vous aviez été convié à prendre part aujourd’hui à une réunion de grande importance, à laquelle devait également participer des hauts responsables, afin de discuter les voies et moyens pour lutter contre la propagation de ce virus sur le corridor partagé par les deux pays (Djibouti Ethiopie). Votre absence a été regrettée lors de la réunion en vidéo conférence », explique dans sa correspondance Mohamed Aden Cheikh, directeur administratif de Djibouti Ports and Free Zones Authority (DPFZA). Il considère que cette absence sans motif légitime est incompréhensible, voire irresponsable, aux regard des enjeux sanitaires dans un contexte de diffusion de la maladie. Face à ce qu’il comprend comme un refus de concertation avec les autorités portuaires pour mettre en œuvre les mesures nécessaires à la protection de la population, Mohamed Aden Cheikh a estimé inévitable la décision d’interruption des activités de l’ATD. Sa priorité est de protéger les près de mille employés des membres du groupement économique. La mesure a été prise conformément aux instructions du président du DPFZA, Aboubaker Omar Hadi. On peut supposer que des contrôles ont mis en évidence des manquements importants à la sécurité, rendant impossible de laisser les opérations se poursuivre. Les autorités portuaires sont très engagées sur les questions de sécurisation sanitaire du personnel, elles ne badinent pas sur le sujet si l’on se fie à la couverture de la RTD sur les moyens qu’elles déploient pour combattre la propagation du virus et assurer la protection de ses agents.
« Le Doraleh Multipurpose Port en étroite collaboration avec l’Union générale des travailleurs djiboutiens (UGTD) a organisé ce lundi 6 avril 2020 une importante séance de sensibilisation pour les dockers en cette période de crise du covid-19.
La réunion a vu la participation du directeur général des ports, Djama Ibrahim Darar, du directeur du Port Labour Service, Osman Hassan Osman, du président du syndicat du Port Labour Service, Barassa Moussa Aden, du chef de service sécurité et hygiène, du président de la commission Ccovid-19, Joël Nervo, et du secrétaire général de l’UGTD, Said Yonis.
Le Doraleh Multipurpose Port a pris toutes les disposition pour se prémunir contre cette pandémie. Un dispositif complet a été mis en place comme les points de lavage des mains dans chaque périmètre du port, et des agents pour la désinfection des véhicules ou locaux. » [2]

Face à son manque de coopération et au vu de l’importance de la crise actuelle, la sanction à l’encontre de l’ATD parait alors difficilement contestable. Elle est guidée par la volonté de ne pas exposer les travailleurs dans une activité comme le transit, ou les manipulations de matériels et documents et les interactions sont multiples. Le respect de la santé des travailleurs prime sur tout les autres facteurs.
L’annonce de sa suspension a fait l’effet d’une bombe parmi les membres privés de l’ATD. On aurait pu penser qu’ils s’excusent et s’engagent à être plus attentifs à la mise en conformité des processus pour assurer la sécurité sanitaire de leurs employés pour récupérer leur agrément. Sauf que cette affaire serait due à un simple malentendu, imputable entièrement à un courriel traité comme un spam par la messagerie de l’ATD qui l’aurait enregistré dans les indésirables… Cependant, cet élément, et les éléments informatiques qui l’appuient, ne suffit pas et la sanction demeure. Le DPFZA demande la désignation de cinq membres de l’ATD qui assisteront à des réunions tous les jeudis avec la communauté portuaire pour faire un point de la situation.
Le président de l’ATD Hassan Ahmed Doualeh explique ainsi que « en date du 15/04/20, le président de l’ATD GIE a reçu un appel de M. Aden de l’APZF pour une réunion préparatoire à la réunion de jeudi 16/04/2020. Le Pdt de l’ATD GIE a participé à cette réunion préparatoire en compagnie de M. Hoch de l’ATRD ainsi que de M. Abdourahman représentant RTA GIE. Ont également participé à cette réunion, les directeurs de DPM, SGTD et Horizons. À la fin de la réunion […] M. Aden nous a informés que la réunion du jeudi 16/04/2020 se fera par vidéo conférence […], et un lien internet sera transmis à chacun d’entre nous pour participer à la réunion.
Le 16/04/2020, le Pdt de l’ATD GIE a vérifié à plusieurs reprises ce lien sans pouvoir le trouver. N’ayant pas reçu de lien et n’ayant pas reçu d’appel de l’APZF à ce sujet, le Pdt dc l’ATD GIE est rentré chez lui à 13h ».

Comme demandé, cinq noms sont transmis à l’autorité portuaire lundi dernier à la suite d’une assemblée générale des membres de l’ATD. Pour s’assurer que la désignation des représentants avait été collégiale, DPFZA a pris attache directement avec les membres de l’ATD pour que ces derniers confirment par courriel les noms des délégués de l’ATD, à savoir : Hassan Ahmed Doualeh, Andre Massida, Charmake Askar Farah, Jean-philippe Delarue, et Robleh Abdillahi. Le procédé étonne. Il souligne que le différend est plus important que la seule question de l’absence non justifiée. Les membres répondent au message pour confirmer les délégués. Tout aurait pu en rester là, sauf que DPFZA demande, par un courriel envoyé tard dans la nuit de mardi, des changements dans la liste des délégués avant le lendemain, mercredi 22. Cette modification est un préalable à la reprise de l’activité.

Mohamed Aden Cheikh, directeur administratif de DPFZA écrit ainsi :
« Nous vous remercions tous pour votre retour et votre collaboration. Cependant, nous constatons un écart de compréhension entre ce que nous avons demandé et ce qui est effectivement avancé par la majorité des membres. L’objectif n’a jamais été d’organiser un vote pour confirmer un comité déjà en place, au niveau de l’association ou le remplacer. Nous vous rappelons encore que nous avons simplement demandé un comité de coordination plus engagé et plus responsable, au niveau de l’ATD, qui participerait aux efforts déployés par les deux pays pour limiter la propagation du Covid-19 dans la chaîne de transport et de la logistique. Ce comité prendra part aux réunions de crise du comité djibouto-éthiopien, organisées régulièrement afin de coordonner les efforts et de s’organiser au mieux dans la lutte contre cette pandémie. Cette crise de par son ampleur, nous oblige à redoubler de vigilance car des vies humaines sont en danger. La profession de transport et logistique est un vecteur d’accélération de la propagation. C’est justement pour ça que le rôle des acteurs de la chaîne logistique se doit être exemplaire, car les enjeux sont plus importants que cet aspect business. Les vies humaines importent plus que toute autre considération. Les membres de l’ATD doivent prendre la pleine mesure de la situation et se hisser à la hauteur de la gravité du contexte. Les mêmes représentants qui ne se sont pas montrés à la hauteur et qui ne se sont pas impliqués, ne peuvent pas encore servir de point focal avec le comité de gestion de crise. Le comité demandé doit répondre à certains critères de base, dont la maîtrise de l’anglais du Porte-Parole du comité et avoir une capacité à relayer les messages et directives aux autres membres. A noter que la liste, endossée par l’ensemble des membres, doit nous être transmise avant 12h, le mercredi 22 avril 2020. En attendant la transmission de cette liste des cinq personnes qui participeront à la prochaine réunion hebdomadaire du comité prévue le jeudi 23 avril à 12h, l’APZFD vous informe que la suspension de l’ATD pour l’activité du multimodal sera maintenue et élargie à toute l’activité de transit (y compris l’unimodal). L’Autorité des ports et des zones franches tient à préciser, qu’elle n’est nullement intéressée à se substituer à l’ATD ni à ses membres, ses activités, sa structure et son fonctionnement interne ».

Doit-on comprendre que ces dispositions ne sont pas une défiance envers le comité directionnel de l’ATD, alors que les activités suspendues sont élargies à l’unimodal ? Malgré les assurances affichées par Mohamed Aden Cheikh expliquant le sens de sa démarche, cette nouvelle situation fait pousser des ailes à certains membres de l’ATD qui voient là une opportunité pour une modification du bureau de l’organisation. Elle n’a pas eu lieu, le bureau a été entièrement reconduit par près de 95% des votants. L’ATD doit prendre des dispositions afin de mieux protéger ses salariés du covid 19… C’est sans doute la première structure de cette importance sanctionnée aussi sévèrement à Djibouti. Dommage qu’il n’y ait pas eu de mise en demeure préalable. Quoi qu’il en soit, espérant comme le dit Mohamed Aden Cheikh qu’il est seulement reproché à la société de méconnaitre la santé et la sécurité de ses équipes, et qu’il ne s’agit en aucune manière de s’immiscer dans la gestion interne d’une des plus grandes sociétés de la place de Djibouti, que « les vies humaines importent plus que toute autre considération » et que le contentieux ne porte fondamentalement que sur ce point ! L’ avenir nous le dira.

Mahdi A.


[1Courrier référencé DPFZA/049/20.

 
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