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L’Éthiopie s’apprête à lever l’état d’urgence
par Mahdi A., juin 2018 (Human Village 33).
 

Selon une information de la Fana Broadcasting (FBC) le gouvernement éthiopien s’apprêterait à lever l’état d’urgence voté par la Chambre des représentants du peuple le 16 février 2018 pour une durée de six mois. Il aurait du prendre fin le 16 août 2018.
Deux textes seront soumis à l’examen des élus nationaux éthiopiens, un projet de loi sur le pardon et les conditions de sa mise en œuvre, un second qui supprimera la promulgation n°1083/2010 instaurant l’état d’urgence.

Le projet de loi sur l’accord concernant le travail des ressortissants d’Éthiopie et d’Arabie saoudite, qui aurait également du être soumis à l’examen des élus, sera très probablement renvoyé en commission et a été donc déprogrammé de la séance plénière de demain, mardi 5 juin 2018, selon le média public de la Fana Broadcasting [1].
Ce renvoi en commission du texte peut être interprété comme un signe pour signifier diplomatiquement le mécontentement de l’Éthiopie de ne toujours pas voir libérer le milliardaire saoudo-éthiopien Al Amoudi, malgré l’engagement du royaume d’Arabie saoudite [2]. Celle-ci se fait encore attendre !

Aussitôt dit aussitôt fait
Cette annonce n’est pas une surprise puisque la décision de levée l’état d’urgence avait été prise en Conseil des ministres du 2 juin. La seule surprise porte sur la diligence avec laquelle le gouvernement a transmis le texte aux élus nationaux. Cette promptitude dénote le soucis pour le nouveau Premier ministre de répondre à une des grandes attentes de la population. Il se sait très attendu sur le sujet des libertés individuelles qui ont été au cœur de son discours d’investiture le 2 avril 2018. Malgré l’impopularité de cette mesure d’exception, il n’avait pas été en mesure jusqu’à ce Conseil des ministres de pouvoir l’imposer à ses partenaires de la coalition de l’EPRDF.
« Le Conseil des ministres a approuvé, lors de sa réunion ordinaire d’aujourd’hui, un projet de loi qui lève l’état d’urgence actuel, selon Fitsum Araga, chef de cabinet du Premier ministre. Fitsum a déclaré : “le projet sera envoyé au parlement pour examen. Le Conseil a estimé que la situation sécuritaire dans le pays était stable et que la loi et l’ordre étaient rétablis” » [3], selon le compte rendu d’Addis Standard.
La présentation du projet de loi à la Chambre des représentant a sans doute été accélérée après le point d’achoppement sur la question de sa levée lors des discussions de préparations du Forum national. Ces négociations réunissaient les seize partis de l’opposition et ceux issus de la coalition de l’EPRDF. Faute de s’entendre sur une date, un parti décida de boycotter les discussions jusqu’à la suppression de l’état d’urgence. « L’agenda anti-terroriste a également été l’un des sujets les plus controversés dans la négociation, provoquant le retrait du Parti Raey éthiopien (ERP) du forum » [4].
On ne manquera pas de noter l’heureuse coïncidence du diktat du parti Raey éthiopien (ERP) pour revenir à la table de négociation, et la volonté d’Abiy Ahmed Ali d’engager rapidement les réformes pour répondre aux rêves d’aspirations démocratiques des siens ; cette impasse a donné la main au Premier ministre pour franchir une étape supplémentaire dans ses ambitions démocratiques, la levée de l’état d’urgence. Cette décision n’est pas anodine, elle témoigne de son leadership et de sa détermination à réformer vaille que vaille cette grande nation.
Le consensus trouvé pour aller plus loin dans l’ouverture politique, entre les participants au Forum national sur des sujets épineux, permet d’estimer que la glasnost et perestroïka promis par le premier ministre dans son discours d’investiture n’étaient pas une utopie mais qu’elles se profilent bien à pas de loup… sans coup férir. « Jusqu’à présent, le parti au pouvoir et les partis de l’opposition nationale ont accepté de modifier la Proclamation d’enregistrement des partis politiques révisée n°573/2008 et la proclamation n°532/2007 sur le droit électoral en Éthiopie. A la suite des négociations en cours, les parties ont convenu de changer le système électoral du pays en un système électoral mixte, ce qui aurait pour effet de déclencher des modifications constitutionnelles et de modifier la taille de l’organe législatif national » [5] , explique Neamin Ashenafi, dans The Reporter Ethiopia.

Lors de la visite à Addis Abeba fin avril du haut commissaire aux droits de l’homme, il avait rapporté les attentes de la population au nouveau Premier ministre éthiopien après avoir rencontré des bloggeurs et opposants politiques. « Ils ont appelé à de nouvelles libérations de personnes détenues simplement pour avoir exercé leurs droits à la liberté de réunion, d’expression et d’opinion […]. Ils ont également appelé à la levée de l’état d’urgence, à la réforme des autorités chargées de l’application de la loi, au système pénitentiaire et à la réforme judiciaire, en faveur du renforcement de l’indépendance des institutions. Ils ont appelé à un dialogue politique inclusif et à ce que tous les Éthiopiens puissent parler, tweeter, bloguer et protester sans craindre d’être arrêtés » [6]. M. Zeid avait en outre salué la fermeture du centre de détention de Maekelawi. Il semblerait qu’Abiy Ahmed Ali n’ait pas trop tardé à suivre ces recommandations…

Mahdi A.

Additif  : Le Parlement réuni ce matin, mardi 5 juin, a voté comme annoncé en faveur de la levée de l’état d’urgence.


 
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