Des agressions violentes à caractère communautaire, sans distinctions d’âge ou de sexe, se sont déroulées dans la capitale jeudi 29 juillet et dimanche 1er août. Lors de la deuxième journée, elles sont passées de jets de pierres et de dégâts sur des véhicules privés, à des crimes jusqu’alors inconnus sur notre territoire avec l’incendie d’habitations identifiées sur une base communautaire. Une trentaine de logements ont été détruits et une personne est décédée, prise au piège des flammes. Un bilan provisoire fait état de trois autres décès dans des affrontements de rue. On compte également des dizaines de blessés, de nombreux véhicules endommagés ou incendiés, et d’importantes pertes matérielles, dont des commerces pillés et des maisons caillassées, aux vitres détruites.
Inédites à Djibouti, ces violences associent des actes gratuits, des vols et des destructions de biens. Elles mobilisent une dimension communautaire, de tensions entre Afars et Somalis. Le gouvernement craint que des groupes, ayant un agenda politique propre, attisent les brindilles en feu qui ont traversé la frontière à la suite des évènements de Galba Issa/ Gadamaytou. Selon Addis Standard, la répression par les forces de la Lyu police de la région Afar auraient causés plusieurs centaines de victimes. Cette tensions a crée un terreau fertile à une instrumentalisation politique, déplaçant le conflit de l’Éthiopie au territoire Djiboutien.
Dans une allocution sur les ondes de la RTD dimanche 1er août, le ministre de l’Intérieur, Said Nour Hassan, n’a pas hésité à évoquer « des évènements d’une ampleur nouvelle qui sont intolérables ». Il a insisté sur la situation complexe à laquelle ses services sont confrontés, qui pourrait prendre une tournure dramatique si rien n’était fait pour y mettre fin pendant qu’il est encore temps : « Ce soir ce jeu de pierres ne se résume pas à des actes d’enfants, mais à des individus malintentionnés [qui manipulent les jeunes]. L’État va prendre ses responsabilités. Tous les individus impliqués dans ces évènements malheureux seront traduits devant la justice en bonne et due forme ».
Il en appelle à la sagesse et à l’autorité des parents pour éloigner leurs enfants des violences, d’autant plus qu’elles s’amplifient. Il demande aux parents d’épauler les pouvoirs publics, car le gouvernement n’a pas le choix. « À compter de ce jour, le gouvernement va prendre ses responsabilités pour rétablir l’ordre et la paix, notamment en prenant des mesures fortes pour endiguer un emballement de ces violences ».
Au vu des violences de la veille, avec quatre personnes qui ont péri dans des affrontements entre des membres des communautés afar et somalie, le gouvernement est décidé à tout mettre en œuvre pour arrêter la spirale de violences. Ce déchainement justifie une réponse ferme qui porte en germe nombre de blessés parmi les forces de l’ordre et les délinquants.
La procureure de la République, Lamisse Mohamed Said, en échos aux propos du ministre de l’Intérieur, accroit la pression d’un cran sur les ondes de la RTD, au matin du lundi 2 août, contre ceux qui ont commis des crimes contre leurs concitoyens, essentiellement à Warableh, PK12 et, dans la capitale, à Quartier 7 et Arhiba. « Il a été constaté des actes criminels d’une extrême gravité. En effet, des maisons ont été incendiées de manière intentionnelle et l’on déplore malheureusement au moins trois décès. De plus des véhicules ont été dégradés et des personnes innocentes ont été gratuitement violentées. Des investigations sont menées et plusieurs malfaiteurs ont déjà été interpellés et placés en garde à vue. […] Ces agissements sont intolérables et nous prendrons des mesures fermes à l’encontre de tous ceux qui sèment ces troubles et ainsi que ces crimes dans notre pays conformément aux règles et lois en vigueur. » Le message est limpide : le suivi judiciaire sera rigoureux et les propagateurs de haine communautaire ne pourront pas s’en tirer à bon compte.
Ces violences ont suscité des réactions nombreuses et scandalisées, en particulier sur les réseaux sociaux : la réprobation et la condamnation populaire sont unanimes. Nombreux sont celles et ceux qui appellent à une mobilisation citoyenne pour enrayer cette tentative de communautarisation de la violence et permettre un retour de la cohésion nationale.
Mahdi A.
Communiqué du Parquet de Djibouti
Ce jour, jeudi 5 août 2021, vingt-et-un individus ont été déférés au parquet du Tribunal de Première Instance de Djibouti pour des faits criminels.
Une information judiciaire est ouverte pour les faits de dégradations par incendies, d’assassinat, d’atteintes à la paix publique et de violences aggravées.
Les 21 individus ont été incarcérés à la prison de Gabode.
Ce même jour, quarante autres individus ont été déférés au parquet du Tribunal de Première Instance de Djibouti pour avoir commis des faits d’atteintes à la paix publique et de dégradations des biens appartenant à autrui.
Ils ont également tous été incarcérés et comparaîtront à la prochaine audience des flagrants délits.