Human Village - information autrement
 
Trois nouveaux opérateurs logistiques en Éthiopie
par Mahdi A., avril 2024 (Human Village 50).
 

Dans un article publié le 18 mars dernier, le media éthiopien Capital donne le nom des nouvelles entreprises autorisées à exercer dans le domaine du transport multimodal. Cette annonce a eu lieu au cours d’une cérémonie officielle au Sheraton Addis, le 13 mars, présidée par le ministre des Transports et de la logistique, Alemu Sime.
« Outre l’entreprise publique VOCC existante, Ethiopian Shipping and Logistics (ESL), quatre autres opérateurs seront autorisés à accéder au secteur, conformément à un plan dévoilé par le gouvernement il y a près de quatre ans.

Selon la directive n° 802/2021 du ministère des transports sur les licences commerciales et la certification des compétences des opérateurs de transport multimodal, les opérateurs potentiels, y compris les entreprises étrangères, ont été invités à concourir pour l’obtention de la licence. […] entrera en vigueur dans environ deux semaines avec la sélection de Panafric Global, Tikur Abay Transport et Cosmos Multimodal Operation. » [1].

Le diable niche dans les détails : aucun investisseur étranger n’est présent dans le capital des bénéficiaires de ces nominations, Panafric Global, Tikur Abay Transport et Cosmos Multimodal Operation. Pourtant, l’objectif affiché de la législation sur la National Logistics Strategy de septembre 2018 et de la réforme de l’Ethiopian Investment Board était la levée de toutes les restrictions dans le secteur de la logistique, jusque là fermé aux étrangers. Ils pouvaient désormais participer – à hauteur de 49 % - à des joint-venture avec un partenaire local spécialisé dans les services logistiques. Cette importante réforme devait permettre des transferts de savoir-faire [2], et donc d’améliorer l’efficacité des services, mais surtout d’augmenter l’assisse financières des entreprises nationales avec un meilleur accès aux devises. il est donc regrettable de constater qu’aucune des huit entreprises qui ont soumissionné n’a été en mesure de présenter un projet en joint-venture avec un partenaire étranger. C’est pourquoi les nouveaux bénéficiaires avaient demandé, en vain, que le cahier de charge soit revu à la baisse, puisqu’il avait été conçu en tenant compte d’une prise conséquente de participation de partenaires internationaux dans le secteur logistique national.
En autorisant de nouveaux opérateurs aux côtés d’Ethiopian Shipping & Logistics Service Enterprise (ELSE), le gouvernement d’Abiy espère se donner plus de marges de manœuvre en se déchargeant sur le secteur privé du fardeau de la mobilisation des devises nécessaires au financement du fret maritime [3]. Cela pourrait permettre au gouvernement de consacrer ses ressources à d’autres besoins prioritaires du pays. Force est de constater que les professionnels étrangers de la logistique multimodale se détournent de l’ouverture du marché éthiopien. Pour Samuel Bogale, « La liste des entreprises ayant obtenu le premier lot de licences d’opérateurs logistiques multimodaux en Éthiopie se caractérise par un manque flagrant d’entités étrangères, alors que les efforts du gouvernement pour libéraliser le secteur sont entravés par des problèmes de sécurité et des inquiétudes concernant le favoritisme. […]
Les trois adjudicataires ont satisfait aux exigences minimales énoncées dans la directive multimodale préparée par les autorités. Celles-ci comprennent un capital libéré de 350 millions de birrs et cinq hectares de terrain en location ou en propriété, dont trois hectares doivent être utilisés pour développer un terminal avec un minimum de 3 000 mètres carrés d’espace d’entreposage sous douane. Les sociétés ont obtenu un délai de six mois pour finaliser les préparatifs et commencer les opérations. Si elles ne respectent pas ce délai, elles s’exposent à des mesures administratives, notamment à la révocation de leur licence. » [4].

À lire les conditions du cahier des charges initial, discutées le 30 janvier dernier au siège de l’Autorité maritime éthiopienne (AME), notamment les conditions matérielles et les capacités financières demandées, les bénéficiaires semblent avoir toutes les raisons d’être satisfaits. Non seulement ils obtiennent un délai pour répondre aux exigences de l’appel d’offre, de six mois à partir du 1er avril 2024, mais leurs obligations ont fondu comme neige au soleil. Les autorités éthiopiennes de régulation n’ont pu que convenir que les sociétés pressenties pour exercer dans le multimodal n’avaient pu attirer des partenaires internationaux. Elles étaient donc dans l’incapacité de répondre aux conditions de l’obtention de la licence. En conséquence, elles ont été revues nettement à la baisse et sont dorénavant considérées comme raisonnables par les trois entreprises licenciées.
« Malgré les intentions du gouvernement de libéraliser l’industrie de la logistique, les acteurs locaux de la logistique ont exprimé leur mécontentement à l’égard de la directive proposée au cours de la conférence. Ils ont fait valoir que la directive ne tenait pas compte des défis auxquels sont confrontées les entreprises de logistique en Éthiopie, notamment en ce qui concerne l’acquisition des terrains spécifiés. Les acteurs de la logistique ont souligné la difficulté d’accéder à des terrains de 5 000 à 10 000 mètres carrés pour la construction d’entrepôts, affirmant que la directive ne tenait pas compte des capacités des acteurs locaux de la logistique. Ils ont suggéré que la directive pourrait être plus facile à appliquer pour les investisseurs étrangers que pour les entreprises locales, à moins qu’il ne s’agisse de coentreprises. » [5].

Djibouti demande des clarifications pour éviter des interprétations différentes
Avec la directive à distribution restreinte émise par l’Autorité des ports et des zones franches le 17 mars 2024, sur les Non Vessel Operating Common Carrier (NVOCC), Djibouti rappelle sa règlementation : les NVOCC ne sont pas considérés comme des agences maritimes et ne peuvent pas délivrer de connaissements (BIL). Seules les agences maritimes enregistrées y sont habilitées.
« L’Autorité des Ports et Zones Franches de Djibouti (DPFZA) souligne qu’un connaissement (BL) émis par des Non-Vessel Operationg Common Carriers (NVOCC) n’est pas reconnu dans les Ports et Corridors de Djibouti en raison de leur statut légal. De plus, les NVOCC ne peuvent pas garantir le paiement complet des coûts de la chaîne logistique le long du corridor, ce qui pose des problèmes de sécurité, de traçabilité et de responsabilité. Conformément à nos règlements et politiques, les BL délivrés par les opérateurs de transport multimodal, en particulier par les compagnies maritimes, sont les seuls documents légalement reconnus pour les opérations de transport de marchandises dans les ports, zones franches et corridors de Djibouti.
Il est donc impératif pour toutes les entités impliquées dans le transport maritime et les activités logistiques d’adhérer à ces directives afin d’éviter toute perturbation opérationnelle dans les ports, zones franches et corridors de Djibouti. »

Mohamed Adour

Une réforme aux contours flous qui ne fait pas consensus
Bien qu’elle soit accueillie à bras ouverts, en l’état la réforme de la logistique éthiopienne suscite plus de questions que de réponses. Pour mieux comprendre, nous avons interrogé le président de l’association des agences maritimes, Mohamed Adour, sur le sens de la directive d’Aboubaker Omar Hadi relative aux NVOCC. « Il y a plus d’une quarantaine de NVOCC qui travaillent à Djibouti, en s’appuyant, de mémoire, sur neuf agences maritimes. Sachant que vingt-six agences maritimes sont homologuées à Djibouti, dont ESL dans le cadre d’un accord bilatéral qui l’autorise aussi à opérer sous forme de NVOCC lorsque les produits ne sont pas acheminés sur ses propres navires.
Avant 2020 et la crise du covid, les opérateurs NVOCC représentaient une part extrêmement faible du trafic conteneurs à Djibouti. Ces opérations ont connu un essor hors norme avec la crise de la logistique, dont notamment la grave pénurie de conteneurs au niveau mondial. Profitant de ce contexte international favorable, ces entreprises sont parvenues à constituer un marché de niche de plus en plus conséquent, en proposant la location de leurs conteneurs à des prix compétitifs pour l’acheminement des marchandises door to door, en les chargeant sur les navires des grandes lignes.
Lorsque le commerce maritime connu un engorgement de marchandises dans certains ports, fautes de conteneurs ESL disponibles, certaines marchandises étaient bloquées des mois sur des quais en Chine ou en Turquie. C’est pour éviter ces situations que l’Autorité maritime éthiopienne n’avait pas hésité à délivrer des dérogations provisoire – et donc briser le monopole de l’ESL sur le transport importations/exportations – pour certaines importations prioritaires. Certaines entreprises utilisèrent cette concurrence pour faire acheminer plus rapidement leurs marchandises. C’était assez inédit de voir de la marchandise acheminée en multimodal en Éthiopie sans passer par ESL. S’est ajoutée la crise du Bad el-Mandeb qui accentue le rôle des petit navires de type feeder pour l’acheminement des marchandises à destination des pays riverains de la mer Rouge ou du Bad el-Mandeb. Les opérateurs NVOCC y sont très actifs, puisque les grandes compagnies maritimes préfèrent passer par le cap de Bonne Espérance pour des raisons de sécurité. On note donc effectivement un mouvement inédit qui révèle la capacité d’adaptation très forte du secteur maritime. Cela me laisse supposer que c’est un peu l’esprit de la réforme en Éthiopie même si pour le moment nous n’en connaissons pas tous les contours. Si elle se confirme, elle aura été imposée par les autorités, car depuis mai dernier les responsables de l’ESL ont mis le holà aux dérogations délivrées par l’Autorité maritime éthiopienne, afin de rétablir leurs parts de marché qui avaient été fortement réduites, d’environ 50%. Donc, j’imagine que ces trois nouvelles entités sont censées apportées flexibilité, efficacité ainsi que des moyens logistiques supplémentaires pour les importations et exportations éthiopiennes. J’ignore les ressources dont disposent ces entreprises, mais elles ne peuvent ignorer que lorsque l’on parle multimodal pour l’Éthiopie, on parle de 800 millions de dollar de fret maritime pour 200 000 conteneurs, 100 millions de dollar de frais portuaires et de transit, ou de 180 millions de dollar de transport routier et par rail… Personnellement, je suis impatient de travailler avec ces trois nouveaux opérateurs ».
Petite confidence : le principal avantage des agences maritimes est d’être le seul opérateur de la chaine logistique à être payé d’avance par le client, à savoir le transitaire. Sans l’obtention du paiement de l’intégralité des frais, elles ne sont pas autorisées à délivrer le document de connaissement.

S’il y a bien une entreprise que cette réforme logistique en Éthiopie fait grincer des dents, c’est Ethiopian Shipping and Logistics (ESL). Encore récemment, la direction d’ESL se frottait les mains d’avoir pu mettre un terme aux dérogations d’affrètement de marchandises sans passer par ses services pour les importations/exportations éthiopienne… Mais patatras, le gouvernement fait un virage à 180 degrés, - sous forte pression du FMI – et ouvre les vannes du libéralisme, notamment dans le secteur de la logistique, un secteur détenu depuis longue date par cet opérateur nationale unique, ESL. Ce fleuron de l’économie éthiopienne annonce pour l’exercice 2022/2023 un bénéfice de plus de six milliards de birrs.
« Le rapport de l’ESL indique que sur le total des cargaisons non conteneurisées, l’ESL n’a pris que 34 % du fret maritime. La principale raison en est que les cargaisons d’importation en provenance de Djibouti augmentent et que l’expansion des cargaisons d’importation par dérogation a été élevée. De même, l’ESL avait une part de 55 % dans le fret conteneurisé. En ce qui concerne les exportations, l’ESL a traité 30 % des 922 858 tonnes de cargaisons sortantes, qui ne font pas partie du système multimodal. ». Selon M. Berisso, la question de la dérogation a été résolue à la fin de l’exercice budgétaire et les cargaisons sont désormais acheminées par le biais du système multimodal, qui est entièrement contrôlé par ESL :« Nous avons discuté et résolu la question et je pense que pour l’année budgétaire en cours, de telles questions ne nous dérangeront pas », a déclaré le PDG [6].

Robleh Mohamed Barreh

Comment les transitaires djiboutiens voient-ils la réforme logistique éthiopienne ?
Pour prendre le pouls de la profession, nous avons rencontré samedi 30 mars dernier, plusieurs responsables du bureau de l’ATD, dont le président Robleh Mohamed Barreh, le premier vice-président Mohamed Daoud Mohamed, le deuxième vice-président Bogoreh Ali Maidal, le secrétaire général Robleh Abdillahi. Étaient aussi présents, le secrétaire à la Chambre de Commerce, Abdourahman Elmi, et enfin le président de l’Association des agences maritime, Mohamed Adour, cité plus haut.

Pour le président de l’ATD, Robleh Mohamed Barreh, il est important que les termes de l’engament des différentes parties soient clarifiés, afin que les Éthiopiens puissent appréhender le débat qui les concerne. Il rappelle que la relation entre ESL et ATD remonte à 2006. Il se dit préoccupé par les conséquences sur la santé financière de leurs entreprises en cas de défaillance des règlements de ces trois nouveaux opérateurs. « Cette réforme n’est pas une surprise, l’Éthiopie en parle depuis quelques années, même si l’opérateur ESL estimait qu’elle avait été enterrée selon les retours que nous avions d’eux. Mais, dans tous les cas, nous sommes heureux de pouvoir élargir le nombre de nos clients dans le multimodal, et opérer avec quatre, peut-être bientôt cinq, au lieu d’un seul est probablement une belle opportunité pour l’essor de nos activités. Par contre, nous ne voulons pas que cette réforme conduise une part importante des entreprises à mettre la clé sous la porte. Nous avons appris via la presse éthiopienne que les trois nouveaux opérateurs avaient six mois pour s’organiser et remplir les conditions imposées par leur autorité de régulation, c’est un laps de temps suffisant pour que nous puissions, les opérateurs NVOCC et nous, transitaires, convenir d’un modus operandi qui puisse satisfaire toutes les parties concernées.

Mohamed Daoud Mohamed

Il faut bien distinguer le cas d’ESL, compagnie d’État, et des sociétés privée, qui auront je crains encore plus de difficultés que notre partenaire ESL a s’approvisionner en devises auprès des banques de la place d’Addis pour s’acquitter des factures dues. Mes collègues transitaires m’ont confié la lourde charge de faire fonctionner notre groupement, eux se chargent de remplir les conditions d’exécutions convenues avec le client, en l’occurrence ESL, sous peine d’ailleurs de pénalités pécuniaires si cela n’est pas effectué dans les délais impartis. À charge pour moi de veiller au bon fonctionnement de cet écosystème, donc de veiller à la réception des règlements des travaux réalisés par notre groupement. Je ne veux pas m’étaler dessus, on parle d’une ardoise en multimodal et unimodal de l’ordre de 32 ou 33 millions de dollar. Jamais jusqu’à présent nous n’avions atteint un tel niveau d’encours. Pourtant nous avons répondu présents et n’avons jamais rechigné auprès de notre partenaire ESL, dont nous comprenons la situation, pour nous conformer à nos obligations lorsqu’il n’arrive pas à s’acquitter des règlements en temps et heure convenus comme par le passé. Cette relation de confiance n’a pas été tissée du jour au lendemain. Elle s’est mise en place petit à petit, avec le temps. Aussi, vous comprendrez que nous nous posions des questions sur les capacités et les garanties des nouveaux entrants. Nous avons hâte de les rencontrer, de discuter de ces questions entre autres, et surtout de voir comment nous pourrions les aider pour améliorer ensemble la chaine logistique. »

Robleh Abdillahi

L’explication fournie par la presse sur les moyens des nouveaux opérateurs ne convainc pas le premier vice-président Mohamed Daoud Mohamed, qui est très critique sur ce positionnement. « Aujourd’hui, l’Éthiopie veut diversifier ses ports de desserte sur l’ensemble des pays de la Corne pour l’acheminement de son fret. Moi à titre personnel, je m’interroge : que va-t-il se passer si l’un de ces opérateurs NVOCC, après nous avoir fait travailler pour plusieurs millions de dollars, décidait de changer de port d’embarquement et d’exportation pour la marchandise de ses clients, puisque dorénavant c’est lui seul qui décide. S’il décide de tirer un trait sur sa dette, ses engagements financiers vis à vis de l’ATD, du jour au lendemain, pour se déporter vers Berbera ou Lamu, c’est la ruine de notre profession. Nous ne pourrions éponger une telle déconvenue financière ».

Le secrétaire général Robleh Abdillahi a les mêmes inquiétudes, « Nous demandons qu’à avoir confiance. Qu’est ce qui pourrait être mis en place pour que cela ça ne se reproduise pas ? Nous avons déjà été confrontés à des sociétés de transite éthiopien en unimodal qui ferment pour cause de faillite après nous avoir laissé de lourds impayés, et puis qui reviennent sur l’activité avec une nouvelle dénomination, enregistré auprès des autorités éthiopiennes sous le nom de leur épouse ou de l’un de leur proche. Il faudra mettre en place des garde-fous. A nous d’être vigilants, il en va de la survie future de nos entreprises. »

Bogoreh Ali Maidal

Pour le deuxième vice-président Bogoreh Ali Maidal, « Deux conditions devraient cependant être réunies pour rendre le positionnement réellement convaincant. D’une part, que l’on sache précisément de quoi l’on parle avec les NVOCC – ce qui, malgré les efforts affichés, par les autorités éthiopiennes, n’est pas clair du tout pour la partie djiboutienne - et, d’autre part, de quelles garanties disposent ces nouvelles entités ? Le multimodal, c’est un marché qui nécessite une trésorerie de plus d’un milliard de dollar pour couvrir les besoins de l’Éthiopie. A l’aune de l’expérience d’ESL, je m’interroge. »

Abdourahman Elmi

D’accord sur le fond, le secrétaire à la Chambre de Commerce, Abdourahman Elmi, se montre relativement optimiste, favorable à la mise en place d’un groupe de travail pour trouver des pistes pour aplanir les craintes de part et d’autre [7] : « L’ambition suppose de prendre le temps nécessaire. Je sais que certains trouvent le temps long et font montre d’impatience comme a pu le rapporter la presse éthiopienne, c’est normal… Je demande que nous soyons tous jugés sur le résultat final. La méthode a été critiquée par le passé mais la décision a porté ses fruits dans le multimodal entre ESL et ATD. Nous avons démarré timidement, en mettant la charrue après les bœufs et non l’inverse. Pour faire converger les idées, prenons déjà le temps de réunir autour de la table les différentes parties pour aplanir les incompréhensions et répondre aux inquiétudes légitimes des uns et des autres. Je suis serein, nous y parviendrons. »

Éthiopie, un colosse aux pieds d’argile
L’Éthiopie d’Abiy est le théâtre d’une grave crise politique, hors de contrôle, qui découle de multiples crises prolongées qui atteignent un point critique. Le gouvernement n’a d’autre choix que de se démener pour rassurer les investisseurs [8], plus grave, les touristes désertent la destination. Un manque à gagner préoccupant pour l’Éthiopie alors que la crise sécuritaire se prolonge, l’économie demeure étranglée par un manque de liquidités en dollars. Depuis le début de la guerre le birr s’est déprécié de plus de 114% sur le marché noir des devises où les taux de change diffèrent considérablement du marché officiel. Le FMI est prêt à consentir à l’octroi d’un nouveau plan d’aide financière à Addis, mais le retard dans le train de réforme reporte le versement [9]. En outre, malgré l’incroyable accélération des annonces réformatrices diffusées ces dernières semaines par le gouvernement d’Abiy, rien n’y fait : les investisseurs se détournent [10], y compris l’alléchante libéralisation du secteur de la logistique. Sans revirement spectaculaire de la politique monétaire [11], difficile d’espérer un nouvel élan. En attendant, dans la presse éthiopienne, Chine, Inde, Turquie et Djibouti sont décrits comme les partenaires les plus fiables de l’Éthiopie, dont les entreprises privées sont les plus tolérantes, les plus compréhensives envers les Éthiopiens à propos des problèmes liés aux devises, et donc des difficultés à s’acquitter de dettes fournisseurs contractées ces dernières années.
Preuve, s’il en était nécessaire, de la capacité des deux partenaires, Éthiopiens comme Djiboutiens, à s’entraider lorsque le besoin se fait ressentir. Nul intérêt de s’inquiéter, les trois nouveaux opérateurs éthiopiens seront in fine les bienvenus pour opérer depuis Djibouti, après avoir rassuré leurs partenaires djiboutiens sur leur solidité financière.

Mahdi A.

Article in English

[1Muluken Yewondwossen, « Government urged to ensure equal competition in multimodal transport sector », Capital Ethiopia, 18 mars 2024.

[2Samuel Bogale, « Ministry looks to involve private investors in ailing railway transport », Reporter Ethiopia, 16 mars 2024.

[3Matiwos Ensermu, « Ethiopia’s Strategic Gambit for Maritime Access, » Addis Fortune, 21 octobre 2023.

[4Samuel Bogale, « Foreign freighters shy away from multimodal logistics operator bid », Reporter Ethiopia, 16 mars 2024.

[6Muluken Yewondwossen, « ESL targets higher revenues as waivers cease », Capital Ethiopia, 11 septembre 2023.

[7Muluken Yewondwossen, « Djibouti prohibits NVOCCs as Multimodal Operators », Capital Ethiopia, 25 mars 2024.

[8Sisay Sahlu, Dutch firms eager for agri investment, wary of security, forex gaps, Reporter Ethiopia, 16 mars 2024

[10Ashenafi Endale, « Will appeal to development partners’ pockets bear fruit ? », Reporter Ethiopia, 16 mars 2024.

[11Muluken Yewondwossen,Ethiopia nears budget limit despite Central Bank’s borrowing restrictions, Capital Ethiopia, 31 mars 2023.

 
Commenter cet article
Les commentaires sont validés par le modérateur du site avant d'être publiés.
Les adresses courriel ne sont pas affichées.
 
modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par les responsables.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

 
L’économie mondiale en panne
 
Nouveau projet de la Banque mondiale
 
Corridor Djibouti-Ethiopie-Soudan du Sud-Ouganda
 
En aparté avec… Yussury Kallouche
 
La justice saisie des conséquences de l’échouage du M/V JI ZHE 3
 
Le transport d’hydrocarbures par le train
 
La guerre en Palestine déstabilise la Corne
 
Ismaïl Omar Guelleh à l’investiture d’Abiy Ahmed
 
La paix avec l’Érythrée… et la quête éthiopienne d’un port
 
| Flux RSS | Contacts | Crédits |