Il est nécessaire de souligner l’importance de développer la filière d’exportation du bétail et la chaîne du froid en Éthiopie afin de renforcer la position de Djibouti dans l’exportation de fleurs, fruits et légumes et d’accroître sa part de marché dans l’agro-industrie mondiale. Il ne s’agit pas seulement d’améliorer la logistique ; il s’agit d’une démarche stratégique qui pourrait faire augmenter de manière exponentielle la position de l’Éthiopie sur les marchés internationaux.
L’Éthiopie se trouve à un moment crucial du processus de modernisation et d’optimisation de sa production. Pour tirer pleinement parti de ses abondantes ressources, le pays doit spécialiser ses centres de formation dans tous les secteurs de production. Fort de ses bases solides dans la culture du café, du teff, des épices (comme le gingembre et le curcuma), des produits horticoles (fruits et légumes), des oléagineux (sésame et soja), des légumineuses (lentilles et pois chiches), des produits d’élevage et de la viande, du miel, du coton, du blé et d’autres produits agricoles divers ainsi que des matériaux de construction, et des industries émergentes comme la production de gaz et le traitement des minéraux (or, tantale, lithium, potasse, pierres précieuses dont opales et saphirs, cuivre, minerai de fer, marbre, gypse, carbonate de calcium, etc.), l’Éthiopie dispose des atouts nécessaires pour renforcer davantage son économie.
Le pays a déjà progressé dans l’ajout de valeur à ses ressources minières avant leur exportation, un effort mis en évidence dans le rapport de la Banque mondiale de 2021 qui souligne le rôle crucial de la transformation des ressources pour le développement économique. En se concentrant sur les activités à forte valeur ajoutée, l’Éthiopie peut générer des emplois, stimuler sa croissance économique et renforcer sa position sur la scène mondiale.
Il est déconcertant et contre-productif que les producteurs, exportateurs et l’ensemble des participants à la chaîne logistique en Éthiopie ne consacrent pas toute l’attention nécessaire à la gestion de la qualité des produits agricoles. Cela affaiblit le potentiel considérable de l’Éthiopie en agriculture, avec de vastes espaces cultivables, des climats divers et des ressources naturelles abondantes. Ces atouts pourraient permettre au secteur agricole éthiopien de devenir hautement compétitif à l’échelle internationale. Mais sans une gestion minutieuse de la qualité et de la logistique, ce potentiel demeure largement inexploité. Cela concerne tous les types de production.
Les avantages logistiques de l’Éthiopie accentuent ce paradoxe. Le pays dispose de certaines des meilleures connexions du continent africain, lui offrant un accès inégalé aux marchés mondiaux. À titre d’exemple :
• Ethiopian Airlines offre la meilleure connectivité aérienne en Afrique, avec des vols directs vers les principaux aéroports mondiaux, facilitant l’accès aux plus grands marchés. Ce réseau sans égal soutient non seulement le tourisme, mais aussi le transport de produits agricoles à forte valeur ajoutée.
• Avec Ethiopian Shipping & Logistics, le pays bénéficie de l’un des réseaux maritimes les plus solides d’Afrique, garantissant une logistique maritime fluide pour les exportations éthiopiennes.
• Par ailleurs, l’Éthiopie bénéficie de liaisons ferroviaires directes vers les ports ultramodernes de Djibouti, qui sont connectés aux plus grandes lignes maritimes mondiales. Cette infrastructure, essentielle à la compétitivité mondiale de l’Éthiopie, permet une logistique d’exportation efficace et rentable.
• Grâce à la synergie du transport multimodal, combinant le maritime et l’aérien, plusieurs ports asiatiques, dont ceux de l’Inde (Mundra), de la Chine (Dalian, Guangzhou, Hong Kong, Ningbo, Qingdao, Shanghai, Shenzhen, Xiamen) et de la Malaisie (Klang), sont actuellement directement reliés au terminal containers en eaux profondes de Doraleh (SGTD). Principalement grâce à Rwandair, EgyptAir et surtout Ethiopian Airlines, le réseau maritime-aérien djiboutien (Djibouti Sea-Air Cargo) facilite ainsi des connexions fluides entre ces ports asiatiques et 28 villes de 25 pays africains :
1. Afrique du Sud (Johannesburg) | 10. Guinée (Conakry) | 19. Rwanda (Kigali) |
2. Bénin (Coutonou) | 11. Guinée Équatoriale (Malabo) | 20. Somalie (Mogadiscio) |
3. Botswana (Gaborone) | 12. Madagascar (Antananarivo) | 21. Soudan (Khartoum) |
4. Burkina Faso (Ouagadougou) | 13. Mali (Bamako) | 22. Tchad (N’Djamena) |
5. Cameroun (Douala) | 14. Namibie (Windhoek) | 23. Togo (Lomé) |
6. Côte d’Ivoire (Abidjan) | 15. Niger (Niamey) | 24. Zambie (Lusaka) |
7. Égypte (Le Caire) | 16. Nigeria (Lagos, Kano) | 25. Zimbabwe (Harare) |
8. Éthiopie (Addis-Ababa) | 17. Ouganda (Entebbe) | |
9. Gabon (Libreville) | 18. RDC (Goma, Kinshasa, Lubumbashi) |
Malgré ces impressionnants atouts logistiques, le manque d’attention portée à la qualité des produits, à la manutention, à l’emballage et à la bonne circulation des marchandises continue de limiter la croissance de l’Éthiopie sur les marchés mondiaux. Alors que la concurrence s’intensifie et que les normes mondiales en matière de qualité et de durabilité s’élèvent, l’Éthiopie risque de rater de nombreuses opportunités si elle ne parvient pas à répondre aux nouvelles attentes. En outre, le fait de négliger ces éléments cruciaux nuit à la réputation du pays en tant qu’exportateur fiable et entraîne des pertes économiques tout au long de la chaîne d’approvisionnement.
Outre l’agriculture, l’Éthiopie a pris des mesures pour transformer les minerais avant de les exporter. Comme le souligne un rapport de la Banque mondiale, ces efforts sont essentiels à la diversification et à la croissance économiques. En intégrant ces industries dans des chaînes de valeur bien définies, l’Éthiopie peut garantir un réseau logistique fluide et synchronisé qui renforcera sa compétitivité au niveau mondial.
Cela conforterait le projet éthiopien de devenir un acteur mondial. Grâce à sa connectivité aérienne, maritime et terrestre de premier ordre, l’Éthiopie est en passe de devenir une plaque tournante essentielle pour l’Afrique, non seulement pour sa propre économie, mais aussi pour l’ensemble du continent grâce à la Zone de libre échange continentale africaine (ZLECAf). L’engagement de l’Éthiopie en faveur de la croissance dans ces secteurs renforce son rôle de leader et en fait le grenier économique de la région, y compris pour le Proche-Orient et au-delà.
L’Éthiopie a déjà démontré sa capacité à exceller dans l’éducation et le développement des compétences, un facteur crucial pour soutenir sa croissance. Le centre d’Ethiopian Airlines, qui a formé d’innombrables professionnels et façonné l’avenir de l’aviation en Afrique, en est un excellent exemple. Ethiopian Airlines a été reconnue par l’Association internationale du transport aérien (IATA) comme la compagnie aérienne la plus performante d’Afrique et reste actuellement la meilleure en termes de réseau, de transport de passagers et de fret, ce qui confirme l’efficacité de son modèle intégré.
En renforçant sa chaîne d’approvisionnement en froid, l’Éthiopie pourrait considérablement améliorer ses capacités d’exportation. L’utilisation des importantes ressources du pays – agricoles, minérales ou industrielles – ne peut atteindre son plein potentiel que par une approche holistique et stratégique de la logistique, de la production et du développement du capital humain.
L’Éthiopie brille comme une lumière blanche, issue de la fusion harmonieuse de différentes longueurs d’onde. La coexistence de nombreuses religions, monothéistes ou non, et son pluralisme pacifique renforcent son unité. La diversité et l’union de ses habitants crée une atmosphère qui permet à tous les Africains de se sentir chez eux, à l’instar de la Malaisie et de son « Malaysia, Truly Asia » (la promotion du microcosme de l’Asie). Cette pluralité offre un terrain fertile pour un dialogue constructif et des échanges respectueux avec d’autres nations africaines, soulignant le rôle diplomatique et économique important de l’Éthiopie sur le continent et au-delà.
Il est à la fois légitime et essentiel pour l’Éthiopie de diversifier et de renforcer son accès maritime, notamment en raison de son vaste potentiel de production. Le pays joue un rôle crucial en desservant des nations enclavées comme le Sud-Soudan, avec la liaison entre Melut et parc industriel de Damerjog à Djibouti (Djibouti Damerjog Industrial Park : zone franche pour l’industrie lourde et complexe portuaire) et à la République Centrafricaine aux ports de la Corne de l’Afrique. Loin d’être rivaux, ces ports créent une dynamique mutuellement bénéfique pour le commerce régional et international. Ensemble, nous formons un écosystème harmonieux et diversifié, uni par des intérêts communs.
En conclusion, la voie de la modernisation suivie par l’Éthiopie, l’accent mis sur l’excellence logistique et l’engagement de professionnaliser son capital humain permettront au pays d’exploiter pleinement son potentiel et d’émerger en tant qu’acteur central de l’arène économique mondiale.
Le renforcement et l’amélioration de la chaîne de valeur et de la chaîne logistique est essentiel. Il est également conseillé, dans tous les domaines, de mettre l’accent sur une plus grande synergie pour plus d’efficacité.
En reconnaissance de notre grande histoire commune et de notre responsabilité collective envers le continent africain et la communauté au sens large, nous devons tous rester profondément engagés à soutenir la croissance régionale.
La paix et la stabilité sont les ingrédients les plus précieux pour parvenir à un développement durable sur les scènes continentale et mondiale.
Mohamed Aref Mohamed
@Mohamed_AREF_M