Conseil des droits de l’homme Groupe de travail sur la détention arbitraire [1]
Avis adoptés par le Groupe de travail sur la détention arbitraire à sa 101e session (11-15 novembre 2024)
Avis n° 67/2024, concernant Abdoulkarim Aden Cher (Djibouti) [2]
Adopté le 14 novembre 2024 (Distr. générale 11 mars 2025).
1. Le Groupe de travail sur la détention arbitraire a été créé par la Commission des droits de l’homme dans sa résolution 1991/42. Son mandat a été précisé et renouvelé dans la résolution 1997/50 de la Commission. Conformément à la résolution 60/251 de l’Assemblée générale et à sa décision 1/102, le Conseil des droits de l’homme a repris le mandat de la Commission. Le Conseil a reconduit le mandat du Groupe de travail pour une nouvelle période de trois ans dans sa résolution 51/8.
2. Le 19 juillet 2024, conformément à ses méthodes de travail [3], le Groupe de travail a transmis au gouvernement djiboutien une communication concernant Abdoulkarim Aden Cher. Le gouvernement a répondu à la communication les 29 août et 3 septembre 2024. L’État est partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
3. Le Groupe de travail estime que la privation de liberté est arbitraire dans les cas suivants :
a) Lorsqu’il est manifestement impossible d’invoquer un quelconque fondement juridique pour justifier la privation de liberté (comme dans le cas où une personne est maintenue en détention après avoir exécuté sa peine ou malgré l’adoption d’une loi d’amnistie qui lui est applicable) (catégorie I) ;
b) Lorsque la privation de liberté résulte de l’exercice de droits ou de libertés garantis par les articles 7, 13, 14, 18, 19, 20 et 21 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et, en ce qui concerne les États parties au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, par les articles 12, 18, 19, 21, 22, 25, 26 et 27 de cet instrument (catégorie II) ;
c) Lorsque l’inobservation totale ou partielle des normes internationales relatives au droit à un procès équitable, établies dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans les instruments internationaux pertinents acceptés par les États concernés, est d’une gravité telle qu’elle rend la privation de liberté arbitraire (catégorie III) ;
d) Lorsqu’un demandeur d’asile, un immigrant ou un réfugié est soumis à une détention administrative prolongée sans possibilité de contrôle ou de recours administratif ou juridictionnel (catégorie IV) ;
e) Lorsque la privation de liberté constitue une violation du droit international en ce qu’elle découle d’une discrimination fondée sur la naissance, l’origine nationale, ethnique ou sociale, la langue, la religion, la situation économique, l’opinion politique ou autre, le sexe, l’orientation sexuelle, le handicap ou toute autre situation, qui tend ou peut conduire au non-respect du principe de l’égalité entre les êtres humains (catégorie V).
1. Informations reçues
a) Communication émanant de la source
4. Abdoulkarim Aden Cher est un citoyen djiboutien né le 25 juin 1986. Il résiderait habituellement dans la ville d’Arta, à Djibouti. Selon la source, M. Aden Cher a été secrétaire national du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs de 2012 à 2019, ministre du budget de mai 2019 à janvier 2022, et économiste au ministère de l’économie, en charge des programmes structurels. Il serait également membre de la Commission électorale nationale indépendante et de la Commission électorale régionale indépendante depuis 2016 et 2017 respectivement, et Directeur général de la Société internationale des hydrocarbures de Djibouti.
i) Contexte
5. La source explique que le président de la République de Djibouti est au pouvoir depuis 1999 et a été réélu quatre fois depuis, après avoir fait modifier la Constitution plusieurs fois à cette fin. Les élections passées auraient été critiquées pour leur manque de transparence, et l’opposition aurait fait face à de multiples obstacles pour faire campagne. Faute d’une nouvelle réforme constitutionnelle, le président ne serait pas en droit de se présenter à l’élection présidentielle de 2026 en raison de son âge.
6. Selon la source, le gouvernement djiboutien procéderait à de nombreuses arrestations arbitraires d’opposants politiques, de militants des droits humains et de journalistes, qui seraient souvent soumis à des actes de torture, à des mauvais traitements et à des détentions prolongées. Le gouvernement aurait également recours à l’intimidation, à des surveillances et à des écoutes téléphoniques pour réduire au silence les défenseurs des droits humains. De surcroît, chaque période électorale donnerait lieu à une purge de l’opposition politique par le pouvoir en place.
7. M. Aden Cher aurait eu un parcours de haut fonctionnaire d’État et serait engagé dans la politique depuis longtemps. Son opposition aux politiques du gouvernement aurait déjà été manifeste lors de l’élection présidentielle de 1999.
8. En mai 2019, le président aurait tenté d’intégrer M. Aden Cher dans le gouvernement, par volonté de réunir différentes tribus en son sein et, selon la source, de légitimer son pouvoir. M. Aden Cher aurait ouvertement refusé.
9. Le 2 janvier 2022, M. Aden Cher aurait été soudainement démis de ses fonctions de ministre du budget par décret présidentiel, et aurait été officiellement limogé pour « rupture de confiance » avec le président. La presse aurait relaté qu’il avait été démis de ses fonctions pour avoir reproché au Premier ministre d’avoir utilisé sa signature sans son accord, avec la complicité du secrétaire général de la primature, fils de la première dame, pour effectuer des retraits auprès de la banque centrale.
ii) Arrestation et détention
10. Le matin du 3 mars 2022, M. Aden Cher aurait publié sur les réseaux sociaux un court pamphlet politique, dénonçant la mauvaise gouvernance et le « césarisme », et prônant un changement positif et inclusif à Djibouti. Il aurait été arrêté le même jour, vers 17 heures, à son domicile. Selon la source, le capitaine de la Section de recherche et de documentation de la Gendarmerie nationale se serait présenté devant le domicile de M. Aden Cher, accompagné de véhicules de la Gendarmerie nationale et du Groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale. L’arrestation aurait été ordonnée par le procureur de la République, mais aucun document n’aurait été présenté à M. Aden Cher lors de son arrestation ou de la perquisition de son domicile.
11. À la suite de son arrestation, M. Aden Cher aurait été placé en garde à vue et conduit dans les locaux du Service de documentation et de sécurité de la Police nationale.
12. La source relève que, selon les autorités, M. Aden Cher a été arrêté et placé en garde à vue à la suite de la publication d’un rapport de l’Inspection générale de l’État sur les dépenses publiques, sur la base de soupçons de détournement de fonds publics, de corruption et de trafic d’influence. Ce rapport aurait été transmis au parquet le 1er mars 2022. Le 6 mars 2022, alors que M. Aden Cher était toujours en garde à vue, le procureur général aurait diffusé un communiqué [4] faisant état d’une « opération mains propres » pour démanteler un réseau de détournement de plusieurs milliards de francs djiboutiens au sein du ministère du budget.
Selon ce communiqué, le rapport de l’Inspection générale de l’État établissait que le ministère du budget avait dilapidé les deniers publics en mobilisant des sommes importantes pour des prestations qui semblaient fictives majoritairement, M. Aden Cher étant directement mis en cause comme le principal instigateur de ce système. Selon la source, la diffusion inédite de ce communiqué en français et en anglais atteste de la volonté du procureur général de donner à l’affaire une large ampleur, notamment au regard de la popularité de M. Aden Cher, et démontre l’enjeu médiatique du dossier pour le gouvernement.
13. Après quatre jours de garde à vue, M. Aden Cher aurait comparu devant le juge d’instruction. Il aurait été mis en examen le 7 mars 2022, remis en liberté et placé sous contrôle judiciaire.
14. Après avoir demandé l’autorisation au procureur général et en réponse au communiqué de ce dernier, M. Aden Cher aurait accordé une entrevue à une radio indépendante qui aurait été publiée en mars 2022 sur un média social de vidéos en ligne et relayée sur de nombreux réseaux sociaux. Au cours de l’entrevue, M. Aden Cher aurait clamé son innocence et dénoncé des poursuites fondées uniquement sur des motifs politiques. Il aurait aussi critiqué le président et affirmé que le procureur général, agissant au service de ce dernier, tentait de salir son image, dans le cadre d’un stratagème visant à l’éliminer de la scène politique. Il aurait souligné avoir collaboré à un audit de l’État, établi des rapports portés à la connaissance du président afin de mettre en lumière le détournement de l’appareil d’État au bénéfice des intérêts privés de certains tenants du pouvoir, et affirmé son opposition à de telles pratiques. M. Aden Cher aurait aussi rappelé qu’en tant que ministre du budget, sa politique était axée sur la volonté de rendre plus autonomes les instances de contrôle de l’utilisation des fonds publics. Il aurait dénoncé l’impunité dont jouissent les personnes qui détournent les deniers publics et affirmé que ce qui lui était en réalité reproché était son action politique et sa lutte contre le clientélisme et le favoritisme. Selon la source, par la diffusion de cette vidéo, M. Aden Cher se positionnait comme opposant au gouvernement.
15. La source rapporte que dans son communiqué de presse du 6 mars 2022, le procureur général présentait M. Aden Cher comme l’instigateur d’un système frauduleux de détournement de fonds publics sans relever que la quasi-totalité des commerçants mis en cause avaient signé des contrats de collaboration avec l’État avant la nomination de M. Aden Cher aux fonctions de ministre du budget. Selon la source, c’est à ce système de clientélisme que M. Aden Cher souhaitait mettre fin.
16. La source relève que l’acte d’accusation ne précise ni la date de commission des faits reprochés ni les détails des transactions, virements ou montants concernés. Elle note qu’en l’absence de plainte ou de dénonciation, le rapport d’enquête d’audit de l’Inspection générale de l’État constitue le seul fondement des poursuites contre M. Aden Cher.
17. Le 23 mars 2022, quelques jours après la publication de son entrevue, M. Aden Cher aurait été placé en détention provisoire par décision de la chambre d’accusation de la Cour d’appel, en application des articles 133 à 145 du Code de procédure pénale, et à la suite de l’appel formé par le parquet contre la décision du juge d’instruction de placer M. Aden Cher sous contrôle judiciaire. Un pourvoi formé par M. Aden Cher contre cette décision de la Cour d’appel aurait par la suite été rejeté par la Cour suprême.
18. La source note que M. Aden Cher a été arrêté sur la base de soupçons de corruption passive, de trafic d’influence et d’entraves à la loi par une personne dépositaire de l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions, en application des articles 200, 201, 206 et 208 du Code pénal, et selon la procédure prévue aux articles 64 et 64-1 du Code de procédure pénale.
19. M. Aden Cher serait ainsi en détention provisoire depuis le 23 mars 2022, sans qu’une date de procès ait été fixée. Le dossier d’instruction stagnerait depuis des mois et aucune date de libération ne serait prévue à ce stade. La source note que, compte tenu de la peine criminelle prévue par l’article 206 du Code pénal, la durée possible de la détention provisoire est illimitée, toutes dispositions limitant la durée maximale de la détention provisoire ne s’appliquant qu’en matière correctionnelle et lorsqu’une personne mise en examen n’a jamais été condamnée à une peine supérieure à trois mois de prison ferme.
iii) Conditions de détention
20. M. Aden Cher serait détenu à la prison centrale de Gabode, à Djibouti, laquelle serait sous le contrôle effectif de la garde pénitentiaire, elle-même placée sous la tutelle du ministère de la justice et donc sous l’autorité directe du Chef de l’État.
21. La source dénonce des conditions de détention particulièrement préoccupantes dans cette prison, rapportées par différentes organisations de défense des droits humains. Elle signale notamment la surpopulation carcérale, une hygiène déplorable, et le manque sévère de nourriture et de soins de santé appropriés. Selon la source, M. Aden Cher est détenu dans des conditions qui s’apparentent à de la torture. La source observe qu’en sa qualité d’ancien ministre et de personnalité publique, M. Aden Cher est censé bénéficier d’une cellule individuelle pour des raisons de sécurité. Cependant, il serait écroué dans une petite cellule rudimentaire et insalubre, infestée de rats, de cafards et de lézards, aux côtés de deux codétenus condamnés à des peines criminelles de droit commun. De plus, il serait contraint de dormir sur un matelas fin posé sur une natte en plastique, à même le sol, bien qu’il souffre de douleurs au dos. Les toilettes ne seraient pas séparées du reste de la cellule, laquelle ne disposerait d’aucune fenêtre et serait constituée d’un plafond, d’un sol et de murs en béton, avec une porte faite de barreaux de métal.
22. M. Aden Cher n’aurait accès à aucune activité à l’extérieur de sa cellule. Il n’aurait pas non plus accès à une infirmerie ou à un dispensaire ni à une bibliothèque. Il serait en mesure de recevoir des visites de sa famille une fois par semaine, mais celles-ci se dérouleraient en présence de deux agents de l’administration pénitentiaire et seraient écoutées et retranscrites sur un ordinateur.
23. La source rapporte que le 22 novembre 2023, vers 3 heures du matin, peu après que la nouvelle de la saisine d’avocats étrangers avait fuité, le mur de béton de la cellule de M. Aden Cher a pris feu comme s’il avait été imbibé d’un produit inflammable. Les détenus auraient appelé au secours mais ce n’est que trente minutes plus tard que les gardes leur seraient venus en aide. La source observe qu’il est impossible qu’un feu se déclare dans des cellules en béton qui ne contiennent aucun élément inflammable. Elle affirme qu’il s’agit d’un acte intentionnel en réponse à l’annonce parue dans la presse de l’imminence d’un recours par M. Aden Cher contre sa détention. L’un des avocats de M. Aden Cher aurait demandé au juge d’instruction l’ouverture d’une enquête quant aux circonstances de cet incendie, qui, à ce jour, n’a abouti à rien.
24. La source note que les conditions dans lesquelles M. Aden Cher est détenu lui font courir un risque réel et sérieux pour sa vie. Elle souligne qu’il est détenu sans que l’instruction de son dossier ait connu la moindre avancée depuis mars 2022 et sans perspective d’être jugé dans un délai raisonnable. Selon la source, une telle détention est assimilable à de la torture psychologique.
25. Par ailleurs, la source rapporte que la famille de M. Aden Cher fait l’objet de pressions en représailles des actions de ce dernier. Un membre de sa famille aurait été évincé de son poste à l’une des hautes administrations du ministère des affaires étrangères et aurait été contraint de quitter le pays. Un autre membre aurait vu son passeport confisqué par les autorités et ses comptes gelés, bien que cette personne ne soit pas mise en cause dans l’affaire concernant M. Aden Cher.
iv) Procédure
26. La source rappelle que le 2 janvier 2022, M. Aden Cher a été démis de ses fonctions de ministre du budget par décret présidentiel pour rupture de confiance. Elle souligne que le portefeuille du budget est l’une des plus hautes responsabilités de l’État, le budget des autres portefeuilles ministériels transitant par celui-ci.
27. Dans le cadre de la procédure contre lui, M. Aden Cher aurait été entendu par le juge d’instruction les 27 mars et 4 mai 2022. Des confrontations avec deux autres individus, dont un mis en cause, auraient été organisées les 9 et 15 juin 2022. M. Aden Cher aurait déposé plusieurs demandes de mise en liberté, lesquelles auraient toutes été rejetées au seul motif de la gravité des faits allégués, sans viser d’éléments précis et circonstanciés tirés de la procédure, bien qu’il s’agisse d’une obligation légale. Ces mêmes motivations auraient été reprises par les juridictions de deuxième ressort et par la Cour suprême. La source note que la Cour suprême s’est prononcée en dernière instance, excluant toute possibilité de recours judiciaire contre la décision de placement sous mandat de dépôt.
28. La source souligne qu’à ce jour, l’instruction du dossier n’est pas achevée, aucun acte d’instruction n’est programmé, et aucune date d’audience sur le fond n’a été fixée. Elle affirme que la détention de M. Aden Cher n’a rien de provisoire dès lors qu’il est détenu depuis mars 2022 et qu’aucun acte de procédure n’a été diligenté depuis le 15 juin 2022.
Depuis lors, M. Aden Cher aurait sollicité la réalisation d’actes d’instruction du juge d’instruction à six reprises. Il aurait notamment demandé une confrontation avec les personnes dont il aurait prétendument sollicité des avantages illégaux et avec les rédacteurs du rapport ayant déclenché la procédure à son égard. Le juge d’instruction n’aurait jamais répondu à ces demandes.
29. La source rapporte que le 19 février 2024, M. Aden Cher a saisi la chambre d’accusation d’un recours sur le rejet implicite de ses demandes, afin de faire constater que les demandes d’actes d’enquête sont restées sans réponse, de solliciter leur réalisation et d’obtenir sa mise en liberté. Par un arrêt en date du 7 mars 2024, la chambre d’accusation aurait fait droit aux demandes d’investigation mais aurait rejeté la demande de mise en liberté. Néanmoins, les confrontations demandées par M. Aden Cher n’auraient toujours pas eu lieu et ne seraient pas programmées. À cet égard, la source s’inquiète de ce que le dossier puisse être clôturé par le juge d’instruction sans que les actes ordonnés par la chambre d’accusation soient réalisés.
v) Analyse juridique
30. La source affirme que la détention de M. Aden Cher est arbitraire au titre des catégories II, III et V.
a. Catégorie II
31. La source rappelle que la Constitution de Djibouti inscrit au sommet de la pyramide des normes les valeurs universelles des droits humains telles qu’elles sont définies par la Déclaration universelle des droits de l’homme et la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
32. Selon la source, l’arrestation de M. Aden Cher n’a d’autre cause que la volonté de l’empêcher d’exercer ses droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique, garantis respectivement aux articles 19 et 20 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et aux articles 19 et 21 du Pacte.
33. À l’appui, la source relève que M. Aden Cher a été arrêté le 3 mars 2022, dans un contexte de menaces et d’arrestations massives et systématiques d’opposants politiques et de voix dissidentes, alors qu’il venait le jour même de dénoncer sur les réseaux sociaux la mauvaise gouvernance et le « césarisme » au sein du gouvernement. Elle note aussi que M. Aden Cher a été incarcéré immédiatement après qu’il a pris la parole lors d’une entrevue diffusée sur un média social de vidéos en ligne dans laquelle il faisait ouvertement état de clientélisme, de népotisme et de corruption au plus haut niveau de l’État.
34. La source explique que les représailles de l’exécutif contre M. Aden Cher ont renforcé sa popularité et sa légitimité politique, comme l’illustrent les manifestations populaires de soutien tenues spontanément après son limogeage et au moment de sa libération de garde à vue. Selon la source, la temporalité de l’arrestation et la mise en détention de M. Aden Cher démontrent clairement la volonté de l’empêcher de nuire au gouvernement.
35. La source rappelle que le Groupe de travail a développé une large jurisprudence relative au caractère arbitraire de détentions résultant de l’exercice du droit à la liberté de religion, d’opinion, d’expression, de rassemblement, d’association, d’investissement dans les affaires publiques ou encore à la liberté de circulation. Elle souligne à cet égard un avis dans lequel le Groupe de travail a conclu au caractère arbitraire de la détention dès lors qu’elle résultait de l’exercice des libertés d’expression, d’association et de participation à un parti politique [5].
b. Catégorie III
36. La source affirme que la détention de M. Aden Cher est arbitraire au titre de la catégorie III dans la mesure où il aurait été privé des garanties relatives au droit à un procès équitable prévues par le Pacte, la Déclaration universelle des droits de l’homme et l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement.
37. Selon la source, les conditions d’arrestation de M. Aden Cher décrites ci-dessus attestent de la violation de l’article 9 du Pacte, qui garantit que nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n’est pour des motifs et conformément à la procédure prévus par la loi [6]. La source relève que l’arrestation de M. Aden Cher est survenue le soir même de sa première publication sur les réseaux sociaux d’un pamphlet politique dans lequel il dénonçait la mauvaise gouvernance et le « césarisme ». La source affirme que l’arrestation de M. Aden Cher a été causée par cette prise de position.
38. Selon la source, le principe d’égalité des armes entériné à l’article 14 (par. 1) du Pacte exige que les deux parties disposent des mêmes droits de procédure et, en particulier, que chaque partie ait la possibilité de contester tous les arguments et les preuves présentés par l’autre partie [7].
39. À cet égard, la source affirme que M. Aden Cher a été placé en garde à vue pendant quatre-vingt-seize heures, sans l’assistance d’un avocat, en dépit de ses demandes. L’avocat de M. Aden Cher n’aurait pas été en mesure de préparer utilement la défense de son client dès lors qu’il n’aurait pu le rencontrer que quelques minutes avant son défèrement devant le juge d’instruction, le 7 mars 2022 au matin, quelques instants seulement après avoir eu accès au dossier. Partant, la source fait valoir que M. Aden Cher a aussi été privé de son droit de communiquer librement avec son avocat et de disposer du temps nécessaire à la préparation de sa défense.
40. La source affirme aussi que le droit de M. Aden Cher à un tribunal indépendant et impartial a été violé, en méconnaissance de l’article 14 (par. 1) du Pacte. Elle relève que, comme l’a noté le Comité des droits de l’homme, l’exigence d’indépendance se réfère notamment à l’indépendance réelle de la magistrature par rapport à l’ingérence des pouvoirs exécutif et législatif [8]. Selon la source, le standard d’indépendance et d’équité doit pouvoir être mesuré à l’aune d’un critère objectif et raisonnable. Elle note que, selon le Comité des droits de l’homme, il appartient généralement aux juridictions des États parties au Pacte d’examiner les faits et les éléments de preuve ou l’application de la législation nationale dans un cas d’espèce, sauf s’il peut être établi que l’appréciation des éléments de preuve ou l’application de la législation ont été de toute évidence arbitraires, manifestement entachées d’erreur ou ont représenté un déni de justice, ou que le tribunal a par ailleurs violé son obligation d’indépendance et d’impartialité [9].
41. Ainsi, la source fait valoir que l’audience du 23 mars 2022, concernant l’appel par le ministère public de l’ordonnance de placement sous contrôle judiciaire de M. Aden Cher, était entachée d’une partialité manifeste. Elle souligne le rejet par la Cour suprême des trois requêtes en nullité de l’instruction, et ce, malgré de nombreuses irrégularités de procédure.
En premier lieu, la source affirme que le dossier ne contient aucune plainte ou dénonciation et que le parquet s’est autosaisi à la suite de la parution du rapport d’audit du 31 décembre 2021, en violation du droit pénal djiboutien. En deuxième lieu, la source fait valoir que la procédure de garde à vue est nulle dès lors que M. Aden Cher n’a pas pu bénéficier de l’assistance de son avocat lors de celle-ci. En troisième lieu, la source soutient que M. Aden Cher a été mis en examen pour des faits de nature criminelle prétendument commis dans l’exercice de ses fonctions ministérielles sans qu’à aucun moment l’Assemblée nationale se soit réunie pour voter sa mise en accusation dans le cadre d’un scrutin public à la majorité des deux tiers des députés, comme le requiert l’article 84 de la Constitution relatif à la Haute Cour de justice. Selon la source, cette violation des dispositions de la Constitution aurait dû à elle seule entraîner la nullité de la procédure. Enfin, la source note que l’article 501 du Code de procédure pénale prévoit une juridiction d’exception pour instruire les actes qui auraient été commis par un ministre dans l’exercice de ses fonctions. Or, en l’espèce, le dossier de M. Aden Cher serait instruit par un magistrat de droit commun sur la base d’une procédure de droit commun, et non par un magistrat de la Cour suprême. Au vu de ce qui précède, la source conclut que les juridictions ayant été amenées à instruire et à trancher le contentieux de la détention de M. Aden Cher ainsi que les requêtes en nullité de la procédure sont manifestement incompétentes et partiales.
42. Par ailleurs, la source fait valoir que les autorités ont violé le droit de M. Aden Cher d’être présumé innocent, garanti par l’article 14 (par. 2) du Pacte. À l’appui, elle souligne la déclaration publique du procureur général, dès l’arrestation de M. Aden Cher, dans laquelle il présentait l’ancien ministre comme « l’instigateur » d’un système frauduleux de détournement de fonds publics. La source note qu’au moment de cette déclaration, M. Aden Cher était en garde à vue et n’avait pas été mis en examen. Elle ajoute que le communiqué, diffusé en français et en anglais afin d’atteindre un public plus large, mentionnait que le rapport « a établi que le ministère a dilapidé les deniers publics » et que « l’enquête a confirmé l’existence d’une concertation frauduleuse ». Selon la source, ces affirmations relèvent de l’appréciation souveraine des juges du fond.
c. Catégorie V
43. La source fait valoir que la détention de M. Aden Cher est arbitraire dès lors qu’il aurait été privé de liberté en raison de ses opinions politiques. En effet, M. Aden Cher aurait été ciblé par les autorités du fait de sa qualité d’opposant politique. La source souligne qu’à la suite de sa mise en examen et de son placement sous contrôle judiciaire, M. Aden Cher a dénoncé un complot politique dans l’entrevue diffusée sur un média social de vidéos en ligne en mars 2022. Selon la source, cette entrevue constitue un testament politique et le véritable motif de la détention de M. Aden Cher.
44. La source souligne que le Groupe de travail a déjà conclu à la nature arbitraire d’une détention au titre de la catégorie V lorsque l’appartenance politique constituait la première cause de la procédure à l’encontre d’une personne que les autorités entendaient empêcher d’exercer son droit à la liberté d’expression, d’association et de réunion [10], similairement au cas d’espèce.
b) Réponse du gouvernement
45. Le 19 juillet 2024, le Groupe de travail a transmis au gouvernement une communication concernant M. Aden Cher, l’y priant de préciser les dispositions juridiques justifiant sa détention ainsi que leur compatibilité avec les obligations de Djibouti en application du droit international des droits humains, et en particulier avec les traités ratifiés par l’État. En outre, il l’appelait à garantir l’intégrité physique et mentale de M. Aden Cher.
Le Groupe de travail a reçu la réponse du gouvernement en deux envois, soit les 29 août et 3 septembre 2024, tous deux dans le délai établi.
46. Dans sa réponse, le gouvernement explique que le 1er mars 2022, l’Inspection générale de l’État, un organe permanent de contrôle et d’inspection des collectivités et organismes publics, a transmis au parquet un rapport d’audit relatif à la situation des dépenses publiques au 31 décembre 2021, duquel il ressortait plusieurs irrégularités, notamment le dépassement de la ligne budgétaire du ministère du budget. C’est ce rapport qui aurait permis à la police judiciaire d’entamer une enquête.
47. Le gouvernement précise que, lors de sa mise en garde à vue le 3 mars 2022, M. Aden Cher a bénéficié de l’assistance d’un avocat. Il souligne que le droit à l’avocat est garanti par la Constitution et le Code de procédure pénale pour toute personne en garde à vue.
48. Pour ce qui est de l’allégation selon laquelle l’acte d’accusation de M. Aden Cher ne précise ni la date de commission des faits reprochés ni les détails des transactions, virements ou montants concernés, le gouvernement souligne que le droit djiboutien n’évoque nullement cette obligation et n’impose pas ces mentions dans le réquisitoire introductif. Il ajoute que M. Aden Cher ayant cessé d’exercer ses fonctions ministérielles depuis le 1er février 2022 en vertu d’un décret, il n’est plus, depuis cette date, un membre du gouvernement au sens de l’article 501 du Code de procédure pénale. C’est donc en toute légalité que le parquet aurait déclenché une information judiciaire le 7 mars 2022 à son égard en application du droit commun. M. Aden Cher aurait ainsi été accusé d’avoir détourné des deniers publics, de s’être livré à de la corruption massive, à du trafic d’influence et à des entraves à la loi, en violation des articles 24, 200, 201, 206 et 208 du Code pénal.
49. Au vu de la gravité des faits criminels qui lui sont reprochés, M. Aden Cher aurait été placé en détention provisoire le 23 mars 2022 par arrêt de la chambre d’accusation, une décision qui aurait par la suite été confirmée par la Cour suprême. Le gouvernement soutient que le Code de procédure pénale n’impose aucun délai en matière criminelle pour la durée d’une détention provisoire. Selon lui, il ressort des pièces du dossier que la détention de M. Aden Cher était essentielle au bon déroulement de l’information judiciaire.
50. Eu égard à l’allégation selon laquelle l’instruction de cette affaire stagne et donnerait lieu à une lenteur injustifiée, le gouvernement invoque le secret de l’instruction, qui ne lui permettrait de détailler ni les pièces au dossier ni les nombreux actes d’instruction effectués.
Il souligne néanmoins que le dossier a été transmis au procureur de la République le 28 mars 2024, et que celui-ci a transmis son réquisitoire définitif aux fins de transmission à la juridiction d’appel le 25 avril 2024 pour saisine de la juridiction de jugement. Le gouvernement fait valoir que l’affaire est en phase de clôture, et que le délai d’instruction reflète son ampleur au vu des différents actes qui devaient être accomplis. Il souligne, par ailleurs, que le Code de procédure pénale ne définit aucun délai pour la clôture de l’information judiciaire.
51. Le gouvernement rejette toutes les allégations, qu’il estime fallacieuses et malveillantes à l’endroit du système judiciaire djiboutien. Il rappelle que l’indépendance judiciaire est garantie par les articles 71 et 72 de la Constitution. De plus, il considère que l’allégation de violation du droit de M. Aden Cher à un tribunal indépendant et impartial n’est étayée par aucune preuve.
52. Le gouvernement souligne qu’en l’espèce, un juge d’instruction a mené l’information à charge et à décharge en respect de la présomption d’innocence. Il note que de multiples recours, y compris les demandes de liberté des inculpés, contribuent à l’allongement de la durée de la procédure. En l’espèce, la complexité des faits, le nombre important de personnes mises en causes, les recours multiples, les diverses expertises menées, la nature criminelle de l’infraction, ainsi que la nécessaire identification du préjudice pécuniaire suspecté justifient le délai de l’information judiciaire. Le gouvernement précise néanmoins que l’instruction est désormais terminée, et que la chambre d’accusation de la juridiction d’appel devra maintenant statuer sur le renvoi ou non de M. Aden Cher devant la juridiction du jugement.
53. Le gouvernement fait valoir que la liberté d’expression est protégée par la Constitution. Il souligne que pour promouvoir la liberté d’expression et de presse, l’État djiboutien intensifie ses efforts pour développer les technologies de l’information et de la communication. Il a notamment adopté plusieurs textes visant à assurer aux médias la liberté et l’indépendance dans l’exercice de leurs activités, et aux citoyens le droit à une information de qualité et objective [11]. En outre, la Commission nationale de la communication, organe de régulation des médias, assure la liberté et la protection de la presse dans le respect de la loi et des règles de déontologie.
54. En dernier lieu, le gouvernement soutient que la Constitution ainsi que le Pacte garantissent à chaque citoyen le droit de prendre part à la direction des affaires publiques.
Dans ce cadre, Djibouti organiserait régulièrement des élections libres et transparentes, sur lesquelles veilleraient plusieurs institutions internationales et nationales. Il note que M. Aden Cher, figurant parmi les acteurs majeurs de l’organisation des élections à Djibouti, y compris en tant que président de la Commission électorale régionale indépendante en 2016, n’a jamais dénoncé d’irrégularité ou de dysfonctionnement dans l’organisation des nombreuses élections qui ont eu lieu à Djibouti depuis l’adoption de la Constitution, en septembre 1992.
c) Observations complémentaires de la source
55. La réponse du gouvernement ayant été transmise à la source, celle-ci a soumis ses observations complémentaires le 23 septembre 2024.
56. La source soutient que la réponse du gouvernement fournit une analyse abstraite et décontextualisée du cadre juridique à Djibouti, et qu’elle ne répond pas de manière adéquate aux arguments avancés concernant les violations des droits de M. Aden Cher.
57. Dans ses observations complémentaires, la source fait valoir que le gouvernement n’apporte aucune réponse ou réfutation à l’affirmation selon laquelle M. Aden Cher n’a pas bénéficié de l’assistance d’un avocat lorsqu’il en a fait la demande pour la première fois pendant sa garde à vue, et qu’il n’a bénéficié de l’assistance d’un avocat que peu de temps avant la fin de sa garde à vue de quatre-vingt-seize heures. La source soutient que l’exercice des droits de la défense et le respect du principe d’un procès équitable doivent être effectifs, et qu’en ne répondant pas aux griefs susmentionnés, le gouvernement n’a pas réussi à prouver que ces droits n’ont pas été violés.
58. La source note que le fait que M. Aden Cher n’était plus membre du gouvernement depuis le 1er février 2022 ne saurait en aucun cas justifier l’absence de recours à la procédure spéciale prévue par les dispositions de l’article 501 du Code de procédure pénale, à moins que les faits allégués aient pu être uniquement commis entre le 1er février et le 7 mars 2022, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Elle soutient que l’application de cette disposition se détermine par la nature des fonctions exercées par la personne mise en cause à la date de commission des prétendues infractions.
59. La source fait valoir, par ailleurs, que le fait que M. Aden Cher a exercé un recours devant la Cour suprême contre l’arrêt de la chambre d’accusation ne veut aucunement dire que ce recours était effectif. Elle note que le gouvernement paraît implicitement reconnaître que le réquisitoire introductif ne précisait ni la date de commission des faits reprochés ni le montant des détournements allégués, ce qui prive selon elle M. Aden Cher de son droit de se défendre.
60. La source soutient en outre que les retards déraisonnables dans l’enquête et la lenteur de l’organisation du procès constituent des violations des droits de M. Aden Cher. Elle note qu’après une longue période d’inertie, le juge d’instruction qui a refusé les demandes de confrontation de M. Aden Cher, qui n’avait pas été entendu depuis son interrogatoire de première comparution, a enfin, le 28 mars 2024, transmis le dossier au procureur de la République afin de rendre son réquisitoire définitif. Elle note à cet égard que cette transmission est intervenue quelques jours seulement après que les avocats de la source ont saisi le Groupe de travail le 18 mars 2024, et après la diffusion de cette information dans la presse.
2. Examen
61. Le Groupe de travail remercie la source et le gouvernement pour leurs observations.
62. Pour déterminer si la privation de liberté de M. Aden Cher est arbitraire, le Groupe de travail tient compte des principes établis dans sa jurisprudence sur les règles de la preuve.
Lorsque la source établit une présomption de violation des règles internationales constitutive de détention arbitraire, la charge de la preuve incombe au gouvernement dès lors que celui-ci décide de contester les allégations. La simple affirmation, par le gouvernement, que la procédure légale a été suivie ne suffit pas pour réfuter les allégations de la source [12].
a) Catégorie I
63. Le Groupe de travail examinera d’abord s’il y a eu des violations relevant de la catégorie I, laquelle concerne la privation de liberté sans fondement légal. Le Groupe de travail note que plusieurs des arguments avancés par la source au titre de la catégorie III relèvent plutôt de la catégorie I. Il les examinera pour cette raison dans cette section.
64. La source allègue que M. Aden Cher n’a pas été détenu en vertu d’un fondement légal approprié. Elle allègue en particulier qu’aucun document n’a été présenté à M. Aden Cher lors de son arrestation ou de la perquisition de son domicile. De plus, en inculpant M. Aden Cher pour des actes criminels qu’il aurait commis dans l’exercice de ses fonctions ministérielles, l’État aurait violé la procédure édictée à l’article 501 du Code de procédure pénale.
65. Le gouvernement ne répond pas à l’argument selon lequel aucun mandat d’arrêt n’a été émis, et soutient que la procédure prévue à l’article 501 du Code de procédure pénale ne s’applique pas, puisque M. Aden Cher n’était plus membre du gouvernement au moment de son arrestation en mars 2022. Le gouvernement ne réfute pas que les crimes présumés aient été commis pendant la période où M. Aden Cher exerçait ses fonctions ministérielles. En outre, la source souligne que le rapport d’audit soumis par l’Inspection générale de l’État au parquet, qui aurait motivé l’enquête concernant M. Aden Cher, portait jusqu’au 31 décembre 2021.
66. Conformément à l’article 9 (par. 1) du Pacte, nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n’est pour des motifs et conformément à la procédure prévus par la loi. Le Groupe de travail a déjà déclaré que, pour que la privation de liberté ait une base légale, il ne suffit pas qu’il existe une loi autorisant l’arrestation. Les autorités doivent invoquer cette base légale et l’appliquer aux circonstances de l’espèce [13]. Cela se fait généralement au moyen d’un mandat d’arrêt, d’un ordre d’arrêt ou d’un document équivalent [14]. Prenant note des observations de la source et en l’absence de réponse du gouvernement sur ce point, le Groupe de travail conclut que M. Aden Cher n’a pas reçu de mandat d’arrêt ou un document équivalent. Il n’a donc pas été informé des raisons de son arrestation jusqu’à sa comparution devant le tribunal quatre jours plus tard.
67. Le Groupe de travail prend note des arguments de la source concernant l’article 84 de la Constitution et l’article 501 du Code de procédure pénale. Il s’abstient cependant d’examiner ces questions de droit interne. Vu l’absence de réponse du gouvernement quant à la raison pour laquelle un mandat d’arrêt n’a pas été émis, il considère néanmoins qu’une violation de l’article 9 du Pacte a été démontrée.
68. La source allègue en outre que M. Aden Cher n’a été présenté devant le juge d’instruction qu’après quatre jours de garde à vue. Le gouvernement répond que, conformément au Code de procédure pénale, le juge d’instruction a placé le prévenu sous contrôle judiciaire le 7 mars 2022, soit quatre jours après son arrestation.
69. En vertu de l’article 9 (par. 3) du Pacte, toute personne arrêtée ou détenue du chef d’une infraction pénale doit être traduite dans le plus court délai devant un juge. Le Comité des droits de l’homme a noté qu’un délai de quarante-huit heures est généralement suffisant pour satisfaire à cette exigence, tout délai plus long étant strictement exceptionnel et justifié par les circonstances [15].
70. Le gouvernement n’a fourni aucune explication pour justifier le délai de quatre jours entre l’arrestation de M. Aden Cher et sa comparution devant le juge d’instruction. Le Groupe de travail conclut donc que le gouvernement a violé l’article 9 (par. 3) du Pacte. Cette violation a été aggravée dans la mesure où l’avocat de M. Aden Cher n’a été autorisé à le rencontrer que quelques minutes avant sa comparution devant le juge d’instruction le 7 mars 2022 au matin, quelques instants seulement après avoir eu accès au dossier.
71. La source soutient que la détention provisoire de M. Aden Cher constitue une violation de ses droits, alors que le gouvernement répond que cette mesure a été dûment ordonnée sur la base du droit interne. L’article 9 (par. 3) du Pacte prévoit que la détention provisoire ne doit pas être la règle générale. Le Groupe de travail rappelle l’avis du Comité des droits de l’homme selon lequel la détention provisoire doit être une exception et aussi brève que possible, et doit être fondée sur une détermination individuelle du caractère raisonnable et nécessaire, au regard de toutes les circonstances, par exemple pour empêcher la fuite, l’altération des preuves ou la récidive. Les tribunaux doivent examiner si des mesures de substitution à la détention provisoire, telles que la mise en liberté sous caution ou d’autres conditions, rendraient la détention inutile dans le cas d’espèce [16]. En l’espèce, le gouvernement répond que la prolongation de la détention provisoire est justifiable au motif que le Code de procédure pénale n’y impose aucune restriction de durée. Il explique la prolongation de la détention provisoire notamment par les nombreux actes d’instruction effectués. Il convient de noter que le gouvernement n’a pas tenté de justifier la longue période de détention provisoire à laquelle M. Aden Cher a été soumis en se référant aux facteurs énoncés par le Comité des droits de l’homme. Il n’a pas non plus tenté de démontrer que des mesures de substitution à la détention provisoire avaient été envisagées et jugées inappropriées dans le contexte de cette affaire.
72. Le Groupe de travail réitère que le fait qu’un État applique sa législation ne suffit pas en soi à établir que cette législation est conforme aux obligations mises à sa charge par le droit international des droits de l’homme. Aucun État ne peut légitimement manquer aux obligations que lui fait le droit international des droits de l’homme en invoquant ses propres dispositions législatives et réglementaires [17]. En l’espèce, le Groupe de travail considère que la détention provisoire de M. Aden Cher, qui dure maintenant depuis plus de deux ans et demi, constitue une violation de l’article 9 (par. 3) du Pacte.
73. Par conséquent, le Groupe de travail considère que l’arrestation et la détention de M. Aden Cher étaient dépourvues de fondement légal et sont donc arbitraires au titre de la catégorie I.
b) Catégorie II
74. La source affirme que la poursuite de M. Aden Cher était motivée par ses opinions, qui étaient critiques à l’égard de l’état de gouvernance à Djibouti. La source considère en outre que le fait que M. Aden Cher a été arrêté, puis placé en détention provisoire immédiatement après avoir exprimé ses opinions sur les réseaux sociaux indique qu’il a été arrêté pour avoir exercé sa liberté d’expression ainsi que sa liberté de participer aux affaires publiques.
75. Le gouvernement répond que M. Aden Cher a été arrêté pour détournement de fonds publics, corruption, trafic d’influence et entrave à la loi, en violation du Code pénal. Il affirme qu’un rapport d’audit impliquant M. Aden Cher a été communiqué au parquet le 1er mars 2022, soit deux jours seulement avant que l’État procède à son arrestation.
76. À la lumière de ces versions contradictoires, le Groupe de travail rappelle la manière dont il aborde les questions de preuve. Lorsque la source établit une présomption de violation du droit international liée à une détention arbitraire, le fardeau de la preuve incombe au gouvernement, qui doit réfuter les allégations [18]. En l’espèce, le gouvernement a contesté les allégations apparemment crédibles formulées par la source. Dans ces conditions, il appartient au Groupe de travail, au vu de l’ensemble des circonstances, d’évaluer si le gouvernement s’est acquitté de la charge de la preuve.
77. Après avoir examiné les arguments de la source et ceux du gouvernement, le Groupe de travail considère que la détention de M. Aden Cher était en réaction à ses critiques à l’égard du gouvernement. Pour arriver à cette conclusion, le Groupe de travail a pris en compte les observations de la source selon lesquelles l’arrestation et la détention subséquente de M. Aden Cher ont eu lieu immédiatement après qu’il eut publié son message politique sur les réseaux sociaux et donné une entrevue largement diffusée dans laquelle il critiquait la mauvaise gouvernance et dénonçait la corruption au sein du gouvernement.
78. Le Groupe de travail a également pris en considération le fait que l’arrestation de M. Aden Cher a de plus eu lieu dans un contexte de critiques adressées au gouvernement concernant le nombre important d’arrestations arbitraires et illégales, en particulier celles visant des membres de l’opposition politique, des militants des droits humains et des journalistes indépendants. Ces arrestations auraient souvent lieu sans mandat d’arrêt légal, en violation des droits fondamentaux. Les personnes détenues de cette manière feraient état de tortures, de mauvais traitements et de détentions prolongées sans inculpation ni procès équitable. La source fait également état de méthodes d’arrestation brutales, d’intimidation, de surveillance physique et d’écoutes téléphoniques contraignant les défenseurs des droits humains au silence. Le Groupe de travail note à cet effet les préoccupations du Comité des droits de l’homme concernant le rétrécissement de l’espace civique à Djibouti, lorsqu’il avait demandé l’annulation d’un décret présidentiel dissolvant un parti politique d’opposition appelé Mouvement pour le renouveau démocratique et le développement [19]. L’opinion du Groupe de travail selon laquelle le gouvernement n’a, en toute vraisemblance, pas arrêté M. Aden Cher sur la base des conclusions du rapport d’audit, semble confirmée par le fait que jusqu’à tout récemment, il continuait de justifier la détention prolongée de M. Aden Cher par la nécessité de mener des enquêtes supplémentaires. Le Groupe de travail considère que le gouvernement s’est ainsi servi du rapport d’audit comme prétexte et a instrumentalisé les accusations portées contre M. Aden Cher dans le but d’empêcher sa participation à la direction des affaires publiques du pays [20].
79. Ces faits amènent le Groupe de travail à conclure que le gouvernement a arrêté M. Aden Cher en raison de l’exercice de sa liberté d’expression et de sa liberté de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, en violation, respectivement, des articles 19 et 25 (al. a)) du Pacte et des articles 19 et 21 (par. 1) de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Rien n’indique que M. Aden Cher ait été impliqué dans des menaces de violence ou d’autres propos interdits qui pourraient relever des exceptions prévues à l’article 19 (par. 3) du Pacte. Partant, la détention de M. Aden Cher constitue une violation au titre de la catégorie II.
c) Catégorie III
80. Le Groupe de travail va maintenant examiner si la privation de liberté de M. Aden Cher était arbitraire au titre de la catégorie III. Ayant conclu que sa privation de liberté est arbitraire au titre de la catégorie II, le Groupe de travail souligne qu’aucun procès ne devrait avoir lieu.
81. La source affirme que, malgré ses demandes, M. Aden Cher s’est vu refuser l’accès à l’assistance d’un avocat jusqu’à la toute fin de sa garde à vue, quand il a enfin pu s’entretenir avec son avocat pendant quelques minutes. La source affirme que ce retard dans l’accès à l’assistance d’un avocat a empêché M. Aden Cher de communiquer librement avec son avocat et de disposer du temps nécessaire pour préparer sa défense.
82. Le gouvernement répond que M. Aden Cher a pu consulter un avocat pendant sa garde à vue.consulter un avocat pendant sa garde à vue. Il ne répond pas à l’argument selon lequel M. Aden Cher n’a pas eu accès à l’assistance d’un avocat immédiatement après son arrestation et à sa demande, et ne répond pas directement à l’argument selon lequel M. Aden Cher n’a pas eu le temps nécessaire pour consulter son avocat et préparer sa défense.
83. L’article 14 (par. 3 b)) du Pacte garantit le droit des personnes accusées d’une infraction pénale de disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de leur défense et de communiquer avec le conseil de leur choix. Le principe 18 (par. 3) de l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement et la règle 61 (par. 1) de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela) stipulent que les accusés doivent avoir accès à un avocat sans délai. En outre, le principe 9 et la ligne directrice 8 des Principes de base et lignes directrices des Nations Unies sur les voies et procédures permettant aux personnes privées de liberté d’introduire un recours devant un tribunal stipulent que les personnes privées de leur liberté ont droit à l’assistance d’un avocat de leur choix, à tout moment de leur détention, y compris immédiatement après leur arrestation, et prévoient qu’elles doivent être rapidement informées de ce droit dès leur arrestation. L’accès à un avocat ne doit pas être restreint de manière illégale ou déraisonnable.
84. Le Groupe de travail considère que la représentation juridique est un aspect essentiel du droit à un procès équitable. L’assistance juridique doit être disponible à tous les stades de la procédure pénale, à savoir avant le procès, pendant celui-ci et en appel, afin de garantir le respect des garanties d’un procès équitable. Tout refus d’accès à un avocat compromet gravement la capacité des accusés à se défendre dans toute procédure judiciaire.
85. À la lumière de ce qui précède, le Groupe de travail estime que M. Aden Cher a été privé du droit à un avocat immédiatement après son arrestation, en violation de l’article 14 (par. 3 b)) du Pacte et de son droit à un procès équitable en vertu de l’article 11 de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
86. La source allègue que l’État a violé le droit de M. Aden Cher à la présomption d’innocence, en mettant en avant une déclaration publique du procureur général immédiatement après son arrestation, et avant sa présentation au juge, dans laquelle le procureur général a présenté M. Aden Cher comme l’instigateur d’un système frauduleux de détournement de fonds publics. La source note qu’au moment de cette déclaration, M. Aden Cher était en garde à vue et n’avait pas encore été inculpé. Elle ajoute que le communiqué de presse, publié en français et en anglais afin de toucher un public plus large, mentionnait que le rapport établissait que le ministère avait dilapidé les deniers publics et que l’enquête avait confirmé l’existence d’une concertation frauduleuse. Selon la source, ces affirmations sont soumises à l’appréciation souveraine des juges du fond.
87. Le gouvernement soutient que l’affaire a été portée devant un juge d’instruction qui a mené l’enquête à charge et à décharge dans le respect de la présomption d’innocence. Il affirme également que tous les actes nécessaires à l’enquête et à la poursuite des infractions ont été accomplis.
88. Le Groupe de travail rappelle que l’article 14 (par. 1) du Pacte protège le droit de toute personne à l’égalité devant les tribunaux et à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial. L’article 11 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et l’article 14 (par. 2) du Pacte protègent quant à eux le droit à la présomption d’innocence. Après avoir examiné les observations du gouvernement, le Groupe de travail note que celui-ci ne répond pas directement à l’allégation concernant la déclaration publique du procureur général. Le Groupe de travail considère donc qu’une violation du droit à la présomption d’innocence a été démontrée.
89. Sur la base de ce qui précède, le Groupe de travail conclut que les violations du droit à un procès équitable relevées ci-dessus sont d’une gravité telle qu’elles confèrent à la détention de M. Aden Cher un caractère arbitraire relevant de la catégorie III.
d) Catégorie V
90. La source soutient que les opinions politiques de M. Aden Cher sont au cœur de la présente affaire, car elles sont la raison pour laquelle il a été pris pour cible par l’État. La source fait valoir qu’après avoir été initialement libéré sous contrôle judiciaire, M. Aden Cher a été placé en détention provisoire par suite de la diffusion d’une entrevue dans laquelle il dénonçait notamment un complot politique contre lui.
91. Le Groupe de travail rappelle que la détention est arbitraire au titre de la catégorie V lorsqu’elle constitue une violation du droit international découlant d’une discrimination fondée, entre autres, sur la naissance, l’origine nationale, ethnique ou sociale, la religion ou l’opinion politique ou autre. En outre, il note que lorsque la détention résulte de l’exercice actif de droits civils et politiques, il existe une forte présomption que la détention constitue également une violation du droit international pour cause de discrimination fondée sur des opinions, notamment politiques [21].
92. Ayant pris note des détails de l’affaire et examiné les observations de la source et du gouvernement, le Groupe de travail estime que M. Aden Cher a été pris pour cible en raison de ses opinions politiques opposées aux politiques gouvernementales. Plus précisément, le gouvernement n’a pas écarté l’allégation de la source selon laquelle la détention de M. Aden Cher est liée à ses déclarations critiquant les autorités et à son rôle de personnalité publique au franc-parler, ainsi qu’à la tendance plus générale de réprimer des opinions opposées, qui inclurait des arrestations arbitraires et illégales de membres de l’opposition politique, de militants des droits humains et de journalistes indépendants.
93. Le Groupe de travail estime donc que M. Aden Cher est privé de sa liberté pour des motifs discriminatoires fondés sur ses opinions politiques, alors qu’il cherchait à demander des comptes aux autorités. Sa privation de liberté est donc en violation des articles 2, 7 et 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et des articles 2 (par. 1), 19 et 26 du Pacte, et est arbitraire au titre de la catégorie V.
e) Observations finales
94. Le Groupe de travail prend note des allégations de la source selon lesquelles la famille de M. Aden Cher aurait subi des pressions en représailles de ses actes. Un membre de sa famille aurait été démis de ses fonctions dans l’une des hautes administrations du ministère des affaires étrangères et aurait été contraint de quitter le pays. Un autre membre de la famille de M. Aden Cher aurait vu son passeport confisqué par les autorités et ses comptes gelés, bien que cette personne ne soit pas impliquée dans l’affaire contre M. Aden Cher. Le Groupe de travail rappelle que les membres de la famille ne devraient pas faire face à des mesures administratives et gouvernementales négatives en raison des actions de leurs proches.
3. Dispositif
95. Compte tenu de ce qui précède, le Groupe de travail rend l’avis suivant : La privation de liberté d’Abdoulkarim Aden Cher est arbitraire en ce qu’elle est contraire aux articles 2, 3, 7, 9, 10, 11, 19 et 21 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et aux articles 2, 9, 14, 19, 25 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et relève des catégories I, II, III et V.
96. Le Groupe de travail demande au gouvernement djiboutien de prendre les mesures qui s’imposent pour remédier sans tarder à la situation de M. Aden Cher et la rendre compatible avec les normes internationales applicables, notamment celles énoncées dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dans le Pacte.
97. Le Groupe de travail estime que, compte tenu de toutes les circonstances de l’espèce, la mesure appropriée consisterait à libérer immédiatement M. Aden Cher et à lui accorder le droit d’obtenir réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation, conformément au droit international.
98. Le Groupe de travail demande instamment au gouvernement de veiller à ce qu’une enquête approfondie et indépendante soit menée sur les circonstances de la privation arbitraire de liberté de M. Aden Cher, et de prendre les mesures qui s’imposent contre les responsables de la violation des droits de celui-ci.
99. Le Groupe de travail demande au gouvernement d’user de tous les moyens à sa disposition pour diffuser le présent avis aussi largement que possible.
4. Procédure de suivi
100. Conformément au paragraphe 20 de ses méthodes de travail, le Groupe de travail prie la source et le gouvernement de l’informer de la suite donnée aux recommandations formulées dans le présent avis, et notamment de lui faire savoir :
a) Si M. Aden Cher a été mis en liberté et, le cas échéant, à quelle date ;
b) Si M. Aden Cher a obtenu réparation, notamment sous la forme d’une indemnisation ;
c) Si la violation des droits de M. Aden Cher a fait l’objet d’une enquête et, dans l’affirmative, quelle a été l’issue de celle-ci ;
d) Si Djibouti a modifié sa législation ou sa pratique afin de les rendre conformes aux obligations mises à sa charge par le droit international, dans le droit fil du présent avis ;
e) Si d’autres mesures ont été prises en vue de donner suite au présent avis.
101. Le gouvernement est invité à informer le Groupe de travail de toute difficulté rencontrée dans l’application des recommandations formulées dans le présent avis et à lui faire savoir s’il a besoin qu’une assistance technique supplémentaire lui soit fournie, par exemple dans le cadre d’une visite du Groupe de travail.
102. Le Groupe de travail prie la source et le gouvernement de lui fournir les informations demandées dans les six mois suivant la communication du présent avis. Il se réserve néanmoins le droit de prendre des mesures de suivi si de nouvelles informations préoccupantes concernant l’affaire sont portées à son attention. Cela lui permettra de faire savoir au Conseil des droits de l’homme si des progrès ont été accomplis dans l’application de ses recommandations ou si, au contraire, rien n’a été fait en ce sens.
103. Le Groupe de travail rappelle que le Conseil des droits de l’homme a engagé tous les États à coopérer avec lui et les a priés de tenir compte de ses avis, de faire le nécessaire pour remédier à la situation de toutes personnes arbitrairement privées de liberté et de l’informer des mesures prises à cette fin [22].
[2] Mumba Malila n’a pas participé aux délibérations sur l’affaire
[3] A/HRC/36/38.
[4] Communiqué du procureur général n° 46/PG/D122, 6 mars 2022
[5] Avis n° 25/2016, par. 29.
[6] Voir aussi les principes 2 et 36 (par. 2) de l’Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement.
[7] Comité des droits de l’homme, observation générale n° 32 (2007), par. 13.
[8] Ibid., par. 19.
[9] Ibid., par. 26.
[10] Voir l’avis n° 39/2014.
[11] Loi n° 97/AN/20/8ème L relative à la liberté de la communication et de la déontologie de l’information, 16 novembre 2020 ; et loi organique n° 96/AN/20/8ème L portant pluralisme politique lors des campagnes électorales, 14 janvier 2021.
[12] A/HRC/19/57, par. 68.
[13] Avis n° 9/2019, par. 29 ; n° 46/2019, par. 51 ; et n° 59/2019, par. 46.
[14] Avis n° 88/2017, par. 27 ; n° 3/2018, par. 43 ; et n° 30/2018, par. 39. Dans les cas d’arrestations effectuées en flagrant délit, la possibilité d’obtenir un mandat ne sera généralement pas disponible.
[15] Comité des droits de l’homme, observation générale n° 35 (2014), par. 33. Voir également l’avis n° 67/2019, par. 64.
[16] Comité des droits de l’homme, observation générale n° 35 (2014), par. 37 et 38.
[17] Avis n° 15/2023, par. 114.
[18] A/HRC/19/57, par. 68.
[19] Farah c. Djibouti (CCPR/C/130/D/3593/2019), par. 9.
[20] Avis n° 11/2022, par. 38 ; et n° 22/2024, par. 69 et 80.
[21] Avis n° 27/2023, par. 110.
[22] Résolution 51/8 du Conseil des droits de l’homme, par. 6 et 9.