Une enquête a été ouverte pour déterminer les circonstances du naufrage et évaluer son préjudice environnemental. Une procédure devant les tribunaux a été engagée sur ces points. Selon nos informations, une expertise indépendante (CREOCEAN) a été diligentée dont les conclusions ne sont pas éloignées de l’évaluation djiboutienne.
Ces éléments, accompagnés des plaidoiries des avocats des deux parties, seront présentés devant le tribunal de Djibouti ce mercredi 15 janvier 2025.
Le porte-conteneur M/V JI ZHE 3 est arrivé en rade de Djibouti le 27 août 2024 à 9h. Vers 18h, son agent local, Djibouti Shipping Service, informe la capitainerie du port que le navire s’est échoué, alors que la réglementation prévoit que le capitaine du navire doit le faire immédiatement.
La capitainerie du port de Djibouti a tout de suite contacté le navire pour enclencher la procédure prévue en cas d’accident maritime.
Le lendemain matin, 28 août 2024 vers 8h45, une vedette rapide du département phare et balise a été dépêchée pour constater l’état du navire échoué. Vers 9h, l’équipe de plongée a commencé l’inspection. Le constat est clair : le navire est échoué sur les deux tiers de sa longueur, assis sur le récif coralien du banc de Maskali-sud de l’ile de Maskali, à proximité de la balise 0 du canal d’entrée du port.
La capitainerie du port de Djibouti décide de dépêcher sur place le remorqueur Omar Dankali pour déséchouer le navire.
Malgré deux tentatives, en raison de l’importance du navire qui a pénétré le récif corallien en profondeur, l’opération de déséchouage n’a pu être accomplie.
Le 29 août, les remorqueurs Omar Danakali Barkat et Barkat Gourat sont envoyés reprendre le déséchouage, mais l’attitude du commandant du navire aurait entraîné l’arrêt de l’opération.
Le 16 septembre 2024, à l’initiative du commandant du port s’est tenu une réunion pour organiser le déséchouage du navire dont la présence posait des problèmes de sécurité pour l’accès aux infrastructure portuaires. Le même jour, le commandant du navire a informé la capitainerie que le navire s’est déséchoué par ses propres moyens.
Le 17 septembre 2024, une équipe de plongeur a évalué l’impact de l’accident sur le site, en particulier le massif coralien. Le constat est alarmant : le navire a détruit la faune et la flore sur une superficie de 2524 mètres carrés dans une zone composée à plus de 80% de récif coralien, endommagé à plus de 70%. Cette dégradation risque d’être irréversible.
Le déversement de substances dans la mer par le capitaine du M/V JI ZHE 3 est constitutif d’un délit. Par ailleurs, le déséchouage du navire par ses propres moyens n’a-t-il pas aggravé les dommages causés à la barrière de corail ?
Une enquête a été ouverte pour déterminer les circonstances du naufrage et évaluer son préjudice environnemental. Une procédure devant les tribunaux a été engagée sur ces points. Selon nos informations, une expertise indépendante (CREOCEAN) a été diligentée dont les conclusions ne sont pas éloignées de l’évaluation djiboutienne.
Ces éléments, accompagnés des plaidoiries des avocats des deux parties, seront présentés devant le tribunal de Djibouti ce mercredi 15 janvier 2025. Le tribunal évaluera ensuite le montant du préjudice causé à la faune et à la flore marine. Cette affaire n’est pas sans rappeler l’accident du 17 juillet 2017 lors duquel, le navire Bulk Progress avait heurté le banc El Hadj, détruisant définitivement la faune et la flore sur une superficie de 625 métres carrés.
Selon une personne interrogée proche du dossier, « Il y a lieu de préciser que dans la procédure concernant la société Bulk Progress, l’assureur du navire, souscripteur du The twelve P&I Clubs [1] avait été en mesure de délivrer une garantie bancaire conformément à la réglementation internationale et ainsi permettre le départ du navire sans entraver la bonne marche de ses activités commerciales. Le M/V JI ZHE 3 n’est malheureusement en si bonne posture, puisqu’il n’est pas en mesure de produire une garantie bancaire du même ordre car son assureur a constaté que le conducteur du navire n’était pas le commandant du navire lors de l’accostage mais le 3-ème, ce qui constitue une violation du contrat d’assurance ».
On peut se féliciter que malgré les pressions diplomatiques, les autorités portuaires nationales n’aient pas cédé un pouce, se refusant à la pratique du double standard, s’en tenant à la lettre et à l’esprit de la réglementation internationale sur la responsabilité civile de la gestion des risques et assurances des atteintes à l’environnement.
Pour mieux comprendre les enjeux de ces catastrophes environnementales, nous vous invitons à relire notre entretien avec l’équipe scientifique de l’expédition Tara, Francesca Benzon, Andrews Baker, Ameer Abdulla, et le capitaine Daniel Cron, lors de son exploration des fonds marins djiboutiens en 2010.
Que pourriez-vous nous dire sur l’état des coraux, leur diversité, leur particularité en République de Djibouti ? Egalement pensez vous que l’effet du réchauffement climatique aurait pu perturber notre faune sous-marine ?
Dr. Andrews Baker (professeur de Biologie Marine, University of Miami, Florida, USA, spécialiste des algues symbiotique dans les coraux) : On peut d’autant mieux répondre à votre question qu’un des membres de notre équipe scientifique a eu la chance d’avoir pu plonger à Djibouti il y a maintenant près de 10 ans. Il a été agréablement surpris de retrouver le récif corallien 10 ans plus tard en aussi bonne qualité. Le milieu a été bien préservé ! Pourtant dans ce même laps de temps de part le monde, les récifs se sont fortement érodés, pas ici. C’est un fait assez rare, c’est une agréable surprise pour être signalé et ce d’autant plus qu’à cause du phénomène du réchauffement climatique, les coraux ont été soumis à de très fortes pressions : ce qui les a d’ailleurs amenés à blanchir et par conséquent à se détériorer ne pouvant plus se régénérer. Pourquoi Djibouti y a échappé ? Ceci peut s’expliquer par plusieurs raisons je crois : un tourisme peu intensif, une pêche raisonnable et raisonnée, des constructions respectueuses de l’environnement et enfin un littoral pratiquement peu habité. Egalement je pense que la géographie de la République de Djibouti a beaucoup interagi : Il faut savoir que les récifs coralliens sont très sensibles aux élévations de température, le fait que Djibouti soit brassée par des courants puissants d’eau froid remontant d’Afrique du Sud a sans doute contribué à maintenir une température ambiante constante des eaux territoriales.
Dr. Francesca Benzon (coordinatrice scientifique Tara Expédition, Université de Milan-Bicocca, Italie, spécialiste en coraux)
L’objectif de la mission était de mettre en relief la particularité des coraux à Djibouti par rapport à ceux de la mer Rouge ou de l’océan Indien. Nous avons été surpris de rencontrer une telle richesse, aussi variée et plus nombreuse qu’au Yémen par exemple où il y a moins d’espèces malgré la proximité des deux pays. La composition de la faune corallienne de Djibouti étant très intéressante, c’est un genre de mélange de celle que l’on peut rencontrer dans l’océan Indien et dans la mer Rouge. On est vraiment là où les eaux se rencontrent, c’est évident ! Par ailleurs il nous a été donné de rencontrer aussi des lieux vraiment particuliers, comme le Goubet, où d’ailleurs ce fut une extraordinaire découverte pour nous car il n’existait pas de documents disponibles sur la composition et la diversité de la faune corallienne sur ce site. Nous ne savions pas du tout à quoi nous attendre. Finalement sur les 27 plongées que nous avons effectuées, 6 se sont déroulées sur le lieu dit du Goubet, et nous avons été surpris de constater que ce que nous avons vu là-bas est très différent des autres récifs de la République de Djibouti.
Dr. Andrews Baker : Concrètement, on nous avait dit qu’il n’y avait pas beaucoup de coraux dans le Goubet, pourtant sur le versant du récif, la couverture du corail que nous avons rencontré est très importante, surprenante même sur de nombreux endroits, notamment par sa profusion. En général ce corail est différent de ceux que nous avons relevés précédemment à Moucha, Maskali, Obock ou bien encore à Tadjourah. La surface récifale n’est pas abondante comme nous avons pu le voir ailleurs, c’est beaucoup moins homogène au niveau de la distribution des espèces dominantes et de la diversité en général, mais il y a de très grandes différences entre les sites visités. Le Goubet a quelque chose de particulier, voire de très intéressant ! Pourquoi ? C’est une énigme pour nous à l’heure actuelle, nous allons nous efforcer de le découvrir. Ce que nous savons tout de même, c’est que cette vie s’organise autour d’une sorte d’enclos : celle-ci a un écosystème varié avec des espèces plus fréquentes ici qu’ailleurs, est ce que ces espèces arrivent à vivre mieux dans les conditions existantes au Goubet et pourquoi ? Nous venons de tenir une réunion à ce sujet cet après-midi avec le directeur du CERD, ainsi que celui de l’environnement et nous sommes tous bien conscients que ce travail que nous venons tout juste d’amorcer n’est qu’une première étape, beaucoup trop de questions restent en suspens et auxquelles il nous semble important de répondre.
Dr. Francesca Benzon : A ce propos il me paraît important de souligner que nous menons ces travaux en parfaite harmonie et de concert avec le CERD et ministère, de l’Habitat, de l’Urbanisme, de l’Environnement et de l’Aménagement du Territoire, d’ailleurs l’Expédition Tara, n’aurait pu être possible sans le soutien et la contribution de nos partenaires scientifiques djiboutiens.
Les espèces rencontrées au Goubet seraient différentes de celles rencontrées dans les autres sites visités en République de Djibouti. Comment expliquez-vous ces différences ?
Dr. Francesca Benzon : Je ne dirais pas que les espèces soit totalement différentes, je dirais qu’il existe une abondance relative au Goubet d’espèces qui se font plus rare dans le golfe d’Aden et inversement les espèces les moins nombreuses dans le Goubet sont très communes dans le Golfe de Tadjourah…
Dr. Andrews Baker : Maintenant nous devons explorer des hypothèses ! Je suis biologiste moléculaire, pour être plus clair, j’étudie la génétique des coraux et surtout la génétique des algues symbiotiques. Les coraux sont des espèces de vies symbiotiques, il y a le corail qui est un animal très simple mais cet animal vie avec des algues, des toutes petites algues qui vivent dans le corps du corail. Chaque polype d’un corail, chaque partie d’un corail contient jusqu’à un million d’algues symbiotiques et ces algues réalisent de la photosynthèse. Les coraux fonctionnent un peu comme les plantes pour être plus explicite, mais ils restent tout de même des animaux à part entière. Ainsi j’étudie la génétique des algues symbiotiques afin de découvrir si à Djibouti il existe des algues capables de résister aux hautes températures, aux changements de climat. Par exemple en Arabie saoudite, dans le golfe Persique il nous a été donné de constater que les coraux sont parfaitement acclimatés aux changements du climat. Est-ce le cas à Djibouti également ? Cela sera à la base de nos recherches de comprendre ces interactions ! Vous comprendrez donc que notre équipe scientifique vient ici avec des questions auxquelles nous allons essayer de trouver de retour dans nos laboratoires respectifs des réponses vérifiables.
Lors de la visite du navire nous avons pu voir les nombreux prélèvements que vous avez effectués lors de vos différentes plongées, est-ce, à partir de ces éléments prélevés que vous allez tirer les conclusions de vos études ?
Dr. Andrews Baker : En effet, ils vont être transférés à Milan dans le laboratoire du Dr Francesca Benzon tout d’abord pour les études sur les coraux, puis à Miami, en Floride, dans mon laboratoire pour la poursuite de cette étude sur les algues symbiotiques, d’ailleurs desquelles j’extrairais les ADN.
Dr. Francesca Benzon : Les tubes contenaient également des prélèvements qui ont été réalisés en vue de l’étude sur la diversité bactériale associée aux coraux dont les travaux de recherche se dérouleront au centre scientifique de Monaco. Il faut savoir que les coraux se construisent sur des squelettes durs et sur lesquels ils bâtissent un milieu qui profitera et servira pour des millions d’organismes, allant des bactéries aux poissons. Personnellement à Milan, je travaillerai sur l’identification des espèces que l’on rencontre à Djibouti. Je les identifierai par rapport à leur variabilité morphologique car c’est souvent difficile de séparer les différentes espèces. Ainsi en partant de la morphologie et en rajoutant dans mes données les informations liées à l’ADN que transmettra par la suite mon collègue le Dr. Andrews Baker et ainsi par recoupement on arrive à les distinguer les uns des autres. Vous comprendrez que les travaux réalisés à Miami et ceux de Milan sont très liés, interdépendants. Nous allons utiliser les outils traditionnels que vous avez pu voir sur le Tara pour examiner comment les frontières entre espèces sont délimités. Si nous ne disposons pas de ce type d’informations il n’est pas possible de répondre à la question relative au nombre d’espèces présentes en république de Djibouti. Ces études prennent du temps, il faudra s’armer de patience, on peut escompter des résultats entre 6 ou 8 mois après leur arrivée à Milan avant de pouvoir communiquer une liste approximative du nombre d’espèces existantes à Djibouti.
Que pouvez-nous dire sur la composition des espèces de poissons en République de Djibouti ?
Dr. Ameer Abdulla (Group Leader Marine Biodiversity and Conservation Science, IUCN, Global Marine Programme, spécialiste en poissons) : Je me suis intéressé aux espèces de poissons récifaux présents dans la mer Rouge et ceux présents en République de Djibouti afin de relever les particularités existantes. Notez bien que Djibouti est brassée par de puissants courants océaniques très particuliers remontant d’Afrique du Sud et remplis richement en nutriment et en plancton.
Par ailleurs il n’y a pas de pêches intensives contrairement aux autres pays riverains, ici, l’écosystème est préservé. Du coup les liens entre corail et poissons sont très équilibrés. Il faut savoir que si la santé des récifs coralliens est bonne, les poissons seront abondants. C’est le cas à Djibouti.
Y a-t-il des poissons particuliers en République de Djibouti ?
Dr. Ameer Abdulla : Non, pas particulièrement. On y trouve les poissons qui sont communs à la Mer rouge. De nombreux poissons de la mer rouge et de l’Océan indien y sont présents. Une très forte présence de plancton est à signaler, c’est important pour les requins baleines entre autres. Mais aussi très nutritif pour les poissons. La culture alimentaire des Djiboutiens fait qu’ils ne sont pas de grands consommateurs de poissons, ce qui explique sans doute la taille très importante des poissons qu’on y rencontre. Le phénomène de sur-pêche n’existe pas, c’est une très bonne chose.
Dr. Francesca Benzon : Djibouti est très chanceuse de posséder un tel patrimoine aussi diversifié et aussi bien préservé !
Dr. Ameer Abdulla : Néanmoins des programmes de gestion de la pêche pour mieux gérer la ressource devrait être mis en place. Il y a plusieurs façons de protéger son environnement, les outils ne manquent pas : instauration d’aires protégées, gestion de la pêche à travers une politique de quotas… Il est important de comprendre la dynamique, la manière dont cela fonctionne et aussi de disposer de bonnes bases de données afi n de mieux connaître le monde de la pêche à Djibouti : l’effort de pêche, combien de bateaux, le nombres de pêcheurs, le tonnage, la taille du marché local, les espèces les plus pêchées… La protection du récif implique que nous comprenions comment la population utilise et conditionne les produits de la mer. Il faut vraiment sauvegarder ces espèces, il est à craindre qu’avec la hausse de la population dans les années à venir que la pression sur la pêche puisse augmenter considérablement et nuire au repeuplement des espèces.
Combien d’espèces y a-t-il en République de Djibouti ?
Dr. Ameer Abdulla : Je n’ai pas fait un comptage du nombre d’espèces présentes à Djibouti, je me suis plus intéressé à deux familles, les poissons prédateurs et les poissons herbivores. Ces informations sont essentielles si l’on souhaite obtenir des indicatifs pertinents sur l’état de santé du récif corallien. Il faut comprendre que nos plongées se déroulaient en deux séquences, une première dans la matinée et une seconde dans l’après-midi, chacune d’une heure à chaque fois. Aussi vous comprendrez qu’il n’était pas matériellement possible de pouvoir élargir mes travaux à d’autres éléments de recherche mais cela ne veut pas dire que ceci est inintéressant, au contraire je crois même qu’il est important de remettre la base de données disponibles à Djibouti sur les espèces de poissons présentes à jour, la dernière datant de plus de 25 ans.
Que pourriez-vous nous dire sur la qualité et la richesse de la faune sous marine de la République de Djibouti ?
Dr. Ameer Abdulla : Elle est très riche, extrêmement belle, étonnant même sur de nombreux sites, tout particulièrement près d’Obock ! D’un point de vue scientifique cette mission était passionnante. Esthétiquement aussi, ce fut un véritable plaisir de plonger en République de Djibouti. Chaque plongée a été pour nous une découverte. Vous avez ici une telle richesse sous marine qu’il me semble important de la préserver. D’ailleurs la grande taille des poissons à Djibouti témoigne si cela est encore nécessaire de la grande productivité de vos récifs coralliens.
Dr. Andrews Baker : Nous avons pu constater sur certaines zones du pays que la couverture récifale est excellente, elle est de l’ordre de 80 à 90%. C’est un niveau exceptionnel de couverture lorsque l’on sait que la moyenne ailleurs dépasse rarement 40 à 50 %, ce qui est d’ailleurs considéré comme de bonne qualité. Ce qui est le plus marquant, le plus frappant est que ce taux de couverture vaut pour presque tous les sites que nous avons visités. Nous n’avons malheureusement pas pu plonger auprès des îles des 7 frères pour des raisons conjoncturelles mais nous envisageons de poursuivre des travaux sur ce site qui selon les données à notre disposition serait le joyau des récifs coralliens de la République de Djibouti. Il faut bien comprendre qu’en ce qui nous concerne, ces travaux sur la qualité du récif djiboutien ne sont qu’à leur début : Ils doivent nécessairement connaître un prolongement.
Dr. Francesca Benzon : C’est la particularité de Tara, contribuer à ce que tous les scientifiques de part monde puissent se rencontrer et travailler ensemble sur des domaines spécifiques : C’est le cœur du projet de l’Expédition Tara. Le partage, des connaissances et des expériences, est le seul maître mot de l’expédition. Merci Tara donc !
Auriez-vous rencontré au cours de vos plongées au Goubet, le monstre qui hante les fonds marins de l’île du Diable ?
Dr. Francesca Benzon : Je dois reconnaître que j’avais vaguement entendu parler de l’histoire du professeur Cousteau sur le Goubet avant de plonger sur le site. D’ailleurs lorsque vous arrivez à près de 20 mètres de profondeur, et que vous avez en face de vous une visibilité quasi nulle et un fond tout noir vous ne pouvez vous empêcher de repenser à cette histoire sur le monstre du Goubet (petit sourire…) ! Pour rien vous cacher, j’ai arrêté de faire des photos à cette profondeur, je me suis dit que faire des flashs à cette profondeur sans voir ce qu’il y avait en dessous n’était peut-être pas très prudent… Mais bon ne le répétez pas, j’en suis pas très fière…
Dr. Andrews Baker : Cette noirceur à cette profondeur scientifiquement s’explique très bien, son origine vient des sédiments qui s’y trouvent en fortes quantités. Par contre je comprends ma collègue Christina car lorsque vous êtes au fond de l’eau au Goubet, la sensation que l’on ressent est assez ambivalente, difficile à expliquer : c’est mystérieux !
Mystérieux ou inquiétant ?
Dr. Andrews Baker : (Petit sourire…) C’est à la fois mystérieux et inquiétant !
Dr. Francesca Benzon : Dans l’eau, c’est inquiétant et d’une beauté étonnante à la fois ; hors de l’eau, c’est mystérieux !
Dr. Ameer Abdulla : J’ajouterais pour ma part que les poissons y sont très nombreux au Goubet et de tailles assez imposantes. Ceci s’expliquant certainement par le nombre de crevasses et de failles qui y sont présentes. Ces habitats naturels permettent aux nombreux poissons présents sur le site de se cacher des prédateurs, dont fait partie probablement le monstre du Goubet (Grand sourire…) !
Dr. Francesca Benzon : Si vous permettez je voudrais ajouter que ce milieu est vraiment spécial, aussi particulier qu’exceptionnel. Le Goubet est un lieu unique au monde ! Je pense qu’il faudra rester extrêmement vigilant sur les questions environnementales en ce qui concerne la préservation de ce site. Les conséquences d’un désastre écologique sur ce lieu pourraient causer des conséquences irréversibles pour la faune sous marine. Il y a beaucoup, beaucoup à perdre au Goubet. Des projets sont en cours de réalisation à proximité de ce site, économiquement certainement intéressants et créateurs d’emplois c’est une bonne chose, mais il importe de concilier préservation de l’environnement et développement économique de manière harmonieuse. Pour ce faire, il me semble important d’évaluer annuellement les conséquences sur l’écosystème du Goubet afin d’avoir l’opportunité de corriger le tir, le cas échéant, et par là même de minimiser les dégâts qui auraient pu être occasionnés à la beauté et à la richesse exceptionnelle du lieu. Ce n’est pas un coin mort, ce n’est pas un coin monstrueux, c’est un lieu magnifique, un lieu très unique ! Il doit être sauvegardé…
Entretien réalisé par Mahdi A.
[1] The twelve P&I Clubs qui composent l’International Group (le « Groupe ») fournissent entre eux une couverture de responsabilité maritime (protection et indemnisation) pour environ 90 % du tonnage océanique mondial.
Grâce à la structure unique du groupe, les clubs membres, tout en étant individuellement compétitifs, partagent entre eux leurs risques de sinistres importants, ainsi que leurs connaissances et leur expertise respectives en matière de responsabilité des propriétaires de navires et d’assurance et de réassurance de cette responsabilité.
Chaque club du groupe est une association d’assurance mutuelle indépendante et sans but lucratif, qui couvre ses membres armateurs et affréteurs contre les responsabilités civiles découlant de l’utilisation et de l’exploitation des navires. Chaque club appartient à ses membres armateurs et affréteurs, et ses opérations et activités sont supervisées par un conseil d’administration, ou comité, élu parmi les membres. Les opérations quotidiennes des clubs sont gérées par des gestionnaires professionnels, internes ou externes, qui sont nommés par le conseil d’administration ou le comité de leur club et qui lui rendent compte.
Les clubs couvrent un large éventail de responsabilités, notamment la perte de vies humaines et les dommages corporels subis par l’équipage, les passagers et les autres personnes à bord, la perte et l’endommagement de la cargaison, la pollution par les hydrocarbures et d’autres substances dangereuses, l’enlèvement des épaves, les collisions et les dommages matériels. Les clubs fournissent également un large éventail de services à leurs membres, notamment le traitement des demandes d’indemnisation, des conseils sur les questions juridiques et la prévention des sinistres, et ils jouent régulièrement un rôle de premier plan dans la coordination de la réponse et de la gestion des sinistres maritimes.